vendredi 28 mai 2010

La Serbie est un grand mystère

La Serbie est un grand mystère
le jour ignore ce que la nuit mijote,
et la nuit ce que l’aube apporte,
le buisson ne sait ce que rêve son voisin
ni l’oiseau ce qui se trame
entre les branches.

Le lézard ne sait ce qui rampe sous les pierres
ni l’épi de maïs ne pressent
ce qu’il advient dans le champ voisin.
A tout instant tout s’altère,
il n’est ni feuille ni recoin
Qui ne soit mystère.

Et qui sait ce qu’elle recèle
cette innocente rosée brillante ;
ces cris pratiques des paysans
qui résonnent de tertre en tertre
ourdissent un complot peut-être ?

Qui dans ce pays et quand
saura ce que la jeune fille
porte en son sein immaculé ;
quel pesant secret
tient dans ses mains l’enfant ;
et chaque vieille ratatinée,
quel est le but auquel elle tend ?

Dans ce pays vents et parfums,
les ruisseaux et les rivières
et les cloches des monastères
relaient des nouvelles codées,
tandis qu’au premier tournant,
tout à l’orée de telle forêt,
qui sait la rencontre qui t’attend ?

Dans ce pays l’ennemi ne peut
se fier même au pas du lièvre
ni à la trace des pattes bovines.
Ne sont-ce d’occultes combines :
tant les chants des moissonneurs
que les coups de la cognée
et la berceuse près du berceau ?

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Traduction de Desanka Maksimović (1898-1993), «Srbija je velika tajna» Le 30 mai 2010.

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