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mercredi 8 septembre 2010

L'homme à convictions

Nous devrions, pour éviter la sclérose mentale, nous appuyer chaque jour quelques lignes de Zinoviev comme l'on avale une gousse d'ail pour se fortifier. Mais nous ne le faisons pas, car sa vision est trop juste pour être supportable.
Le coup de chance qu'eut sa pensée exigeante et sans béquilles, c'est paradoxalement d'avoir servi d'arme contre l'URSS au temps de la guerre froide.
Ceux qui s'en servaient n'avaient pas vu que c'était un boomerang. Ou bien ils s'en foutaient...
Allons, la dose du soir :
«L’existence de convictions chez l’homme est un signe de sous-développement intellectuel. Elles ne font que compenser son incapacité à comprendre rapidement et exactement tel ou tel phénomène dans sa réalité concrète. Ce sont des idées a priori permettant d’agir dans une situation concrète sans en comprendre le caractère concret. L’homme à convictions est rigide, dogmatique, assommant et, comme il se doit, stupide. Le plus souvent, d’ailleurs, les convictions n’ont aucune influence sur la conduite des gens. Elles ne font qu’enjoliver la vanité, justifier les consciences troubles et masquer la sottise.»
Alexandre Zinoviev, Homo Sovieticus.

lundi 18 février 2008

Testament, 17.2.2008


De l’adresse solennelle du Premier ministre Vojislav Koštunica, Belgrade, 17.2.2008:

«La Serbie est un vieil Etat, et le peuple serbe un vieux peuple européen. Au fil de notre histoire séculaire et créatrice d’Etats, nous avons éprouvé tous les fléaux que des puissances étrangères pouvaient infliger, mais notre histoire nous a encore plus convaincus de la force du droit, de la justice et de la liberté. Le droit, la justice et la liberté nous guideront jusqu’à ce que nous ayons fait réintégrer à la province du Kosovo-Métochie la place qui est la sienne, au sein de l’ordre constitutionnel et juridique de la Serbie. Et pendant que la politique de puissance croit aujourd’hui avoir triomphé en fabriquant un faux Etat, des millions de Serbes pensent déjà au jour de liberté qui doit venir. Nul n’a jamais pu empêcher le peuple serbe de réaliser sa liberté. Tout ce que nous ne pourrons accomplir aujourd’hui sera accompli demain par des générations nouvelles et meilleures que nous. Le Kosovo est la Serbie, et il doit en être ainsi à jamais.»

Les mondialistes occidentaux n’ont rien compris. Le testament renouvelé aujourd’hui à Belgrade va leur empoisonner la vie comme il a miné l’Empire ottoman, l’Autriche-Hongrie et l’Allemagne de Hitler. Désormais, selon l’expression d’un poète belgradois, «ils vont se gratter même là où ça ne les démange pas»...


Source (en serbe):
http://www.rts.co.yu/wupload/video/Kostunica17.ram 


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vendredi 21 juillet 2006

Aux jeunes littérateurs

« …car le temps des mauvaises écritures est passé. »
Baudelaire, Conseils aux jeunes littérateurs.

vendredi 21 novembre 2003

Ivo Andritch, sur la mentalité balkanique


[A propos des Balkans, tiré de Signes au bord du chemin]

Pourquoi les pays balkaniques ne peuvent-ils entrer dans le cercle du monde éclairé, fût-ce par l’entremise des meilleurs et des plus doués de leurs représentants ? La réponse n’est pas simple. Mais il me semble que l’une des raisons consiste en l’absence de respect de l’homme, de sa pleine dignité et de sa pleine liberté intérieure, et ce, d’un respect inconditionnel et conséquent. C’est là notre grande faiblesse et de ce point de vue nous péchons tous, souvent et inconsciemment.
Nous n’avons pas encore suivi cette école-là ni totalement assimilé cet enseignement. Ce manque, nous le portons partout avec nous, comme un péché originel de notre race et le sceau d’une infériorité qui ne se peut cacher.
Il faudrait en parler, de cela, et travailler dessus.

*

Dans celles de nos régions qui ont été sous les Turcs, surtout les plus arriérées, les séquelles de l’esclavage sont parfois plus apparentes, parfois moins, mais il est des instants où elles se déploient toutes devant nous, dans toute leur pesanteur. Nous voyons alors que, là, la vie a été préservée à un prix plus élevé que la vie même, car la force de se défendre et de perdurer a été empruntée aux générations à venir, qui naissaient endettées et surchargées. Ce qui a survécu au fil de cette lutte, c’est l’instinct tout nu de préservation de la vie, tandis que la vie même y était dépouillée au point qu’il ne lui restait guère plus que le nom. Ce qui tient et qui dure, cela est ébréché ou plié, tandis que ce qui naît et qui advient, cela est empoisonné et affligé dans l’œuf. Les pensées et les paroles de ces gens demeurent inachevées, car elles sont entaillées à la racine.


*

Comme tous les extrêmes de la nature, le froid précoce qui vient éveille brutalement en nous des habitudes ataviques, oubliées et profondément enfouies sous de meilleures conditions de vie. Ainsi, lorsqu’à la fin d’octobre, nous entrons dans une maison et que nous sentons que les pièces ont été chauffées pour la première fois, nous nous frottons les mains.
— Tiens, un bon petit feu.
Et l’on s’adosse au radiateur, on ferme les yeux, tandis que s’ouvre devant nous la plaine balkanique déchirée et, en elle, un homme, emmitouflé et recroquevillé, qui se serre auprès d’un feu de berger, cinglé par le vent et par tous les malheurs du monde.

*

Un mode de vie de sauvages, sans plans ni prévisions, sans conscience de la communauté, sans respect de l’autre ni de soi-même en lui, s’étend loin et profond dans le temps et l’espace. Nous luttons avec des traces de ce mode de vie dans bien des régions. Cela se trahit dans les lacunes de l’ordonnancement de nos villages et de nos villes. Nous n’organisons pas le nettoyage, ne prévoyons pas le mauvais temps, choses qu’il n’est point difficile de prévoir. A lieu de cela, nous vivons péniblement et désagréablement pendant des jours et des semaines, nous endurons des souffrances et des renoncements inutiles. C’est ainsi qu’au lieu de payer les choses au prix du travail, de la réflexion, de la concertation et de la prévision, nous les payons au prix le plus élevé, au prix de la vie.

*

Le malheur de notre homme turco-balkanique qui épuise si souvent ses énergies à tenter d’extraire de valeurs existantes des profits personnels, réels ou imaginaires, au lieu de créer de nouvelles valeurs qui, d’elles-mêmes, lui assureront, à lui et aux autres, une bonne vie.

*

L’inefficacité de l’homme de type dinarique ! (Pardonnez-moi ce barbarisme, « l’inefficacité », car je ne peux me le pardonner moi-même.) J’entends par là : son incapacité innée à mener à son achèvement, de manière conséquente et digne, une œuvre bellement et courageusement entamée.

*

Il est dans la nature de notre homme, surtout de celui de type dinarique, de ne s’en tenir à aucune idée, aucune œuvre avec persévérance et cohérence, et de ne pas les accompagner dans leur développement naturel, afin d’influer sur elles. Au contraire, après un premier élan, il abandonne son œuvre, retourne à sa source, la trouble de la pensée et du regard, puis brusquement il en survole tout le cours futur, non encore réalisé et à peine imaginé, avant de revenir enfin au point où l’œuvre se trouve à cet instant précis de son développement naturel. C’est ainsi que les choses se développent plutôt avec sa participation que sous son influence : car il n’est pas en elles, mais au-dessus et à côté. C’est pourquoi, dans la plupart des cas, il ne crée pas les œuvres ni ne dirige les événements, mais se contente d’y réagir, se voulant bien plus initiateur, juge, combattant et spectateur que créateur, ouvrier et gardien. Il y a en lui une tendance évidente à ne pas attendre le développement des choses et à ne pas y prendre part avec son travail et sa patience.

*

De même que dans l’ancienne Chine, jadis, les femmes avaient les pieds mutilés, de même chez nous les Tsintsars ont, dès leur prime enfance, l’âme mutilée.
Elle n’est pas belle, cette pensée, peut-être même n’est-elle pas juste, mais elle m’est apparue depuis longtemps et elle me revient sans cesse, de telle sorte qu’il m’a bien fallu la noter.

*

Une chambre d’hôtel quelque part en Yougoslavie, exiguë et mal chauffée, avec un mobilier à bon marché et un tapis usé, emplie d’un temps mort, grise le jour et éclairée, la nuit, d’une lumière mauvaise et irrégulière. Les ampoules, dans l’espèce de lustre, sont troubles et faibles, tandis que celle de la table de nuit est trop forte, de sorte qu’elle vous frappe la tête et rend fatigante la lecture. Tout est étranger et froid et suscite le désir de fuite. Les choses n’ont pas été acquises ni disposées selon la mesure et les besoins du voyageur, mais selon l’avidité, l’incurie et la rustrerie du propriétaire de l’hôtel et de ceux qui l’administrent.