lundi 7 mars 2011

En attendant 2012...

Mais pourquoi 2012? On a déniché quelque part un calendrier maya qui, semble-t-il, ne compte plus les jours au-delà de cette année-là. Repentez-vous, car la fin du monde est proche! 

Nous voici à la croisée d’une technologie affolante et de la plus sommaire superstition. Celle-ci véhiculée par celle-là, du reste. Que serait le nouveau millénarisme sans l’internet? Que seraient les réseaux intégristes sans la borne wifi gratuite dans le dernier relais mauritanien avant le désert? 

2012

Nous voici, même les sceptiques, à battre le compte à rebours de 2012, repliant en cachette les doigts sous la table. Nous voici à dresser des écrans de fumée face au grand bug qui, lui, nous guette pour de bon. Dernier hochet en date: la voiture électrique. Achetons-nous une demi-tonne de batteries impossibles à recycler, branchons-les sur cent nouvelles centrales nucléaires, c.à.d. cent nouveaux sites irradiés à jamais, et nous aurons biffé notre ardoise de pollueurs à hydrocarbures!

Combattons Charybde par Scylla, la peste par le choléra, Sarko par Ségo!

Soyons sérieux: nous ne savons pas vraiment si le pic pétrolier est vraiment passé, si l’effet de serre nous est dû (quelle présomption!) plutôt qu’à la respiration indifférente de la nature, si le terrorisme international est une vraie menace ou un mauvais alibi. Même la contamination de la planète par les nouveaux Tchernobyls ou les plateformes pétrolières qui flanchent, surexploitées à cause de l’appât du gain devenu la seule loi réelle, n’est pas acquise. Ces lendemains apocalyptiques, dont Hollywood s’emploie à nous infuser des aperçus splendides et lassants par leur abondance, n’existent pas. Seul aujourd’hui existe, mais nous le conditionnons par ces spectres issus de l’hallucination collective. Pour les chasser de notre horizon? Non! Juste pour éprouver le grand frisson à leur inexorable approche.

Aucun de ces cataclysmes n’est sûr, mais une chose paraît déjà acquise: la perte de cohérence massive de l’humanité face aux défis contradictoires que lui posent ses propres inventions (au sens technique et mental). La tête crie: sauvez la planète! lorsque le corps marmonne: quel confort! Ne restent, au bout du compte, que les réflexes hédonistes et sécuritaires issus du cerveau reptilien. Il est beau, le progrès!


Le Nouvelliste, 21/11/2010.

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