39 ans
Voici l'an quarantième de mon âge.
Indécis, las, inquiet, suis allé ronder dans la ville natale aux alentours de minuit, laissant Clo et les petites dans leur lit.
Toujours ce vague désir de rencontre: maraudage érotique ou autre chose de plus insaisissable? Besoin de communion?
Sur le quai, vacarme absurde et assourdissant d'une techno de plage. Un dimanche soir! Toute la ville basse, en amont jusqu'au pont piétonnier, en dedans jusqu'à la place centrale, et en aval jusqu'au pont neuf, est secouée par ce rythme. Et personne n'y fait rien!
Je rencontre, comme toujours, Branko Badjitch dit Chlog, avec son éternel catogan, son éternel t-shirt et son antique bicyclette de femme. Il pérorait, debout, appuyé au guidon, devant quelques marginaux délavés avoisinant la cinquantaine, affalés sur les bancs du quai. Nous nous saluons comme si nous venions de nous quitter, le matin même. Cela fait pourtant toujours un an ou deux de distance...
Il ne change pas. Un demi-siècle et toujours le hippie hors d'âge. Chanteur de hard-rock, et pourtant abstinent, ne boit pas, ne prend aucune drogue, ne fume pas... Quelque chose de saint en lui. Un esprit vif, intelligent, mais sautillant, incapable de se fixer. Ses coq-à-l'âne finissent par lasser.
J'étais sorti, aussi, afin de "prendre quelques résolutions" au fond de mon désespoir (aussi bien intérieur, personnel et professionnel, qu'extérieur face à la décomposition de tout). Me disais que je ferais bien d'écrire un bilan de ma vie. Qui suis-je, dans le fond? Noter les origines ambiguës, catholiques et orthodoxes, croates et serbes, chrétiennes et communistes, le déchirement entre deux mondes, les gros vices personnels et les phobies, la paresse, l'indécision, l'oblomovisme. Faire le point sur l'apport familial. M'interroger sur ce que je veux vraiment et les moyens d'y parvenir.
Prié tout le long du chemin. Seigneur, emplis de vie ce mollusque, cette méduse à forme humaine, donne-moi d'épauler autrui plutôt que d'en attendre mon mouvement. Donne-moi d'être aimable, que mon énergie suscite l'élan des autres et mérite le sacrifice...
On m'avait dit, dans les mois d'hésitation après le départ de l'Age d'Homme: écoute ta voix intérieure, et suis-là. Or, soyons francs: elle ne m'a rien dit. Je n'ai fait que suivre la pente tracée par le passé et par le ressentiment. Fallait oser en faire table rase...
Seule lueur dans le marasme: le retour, hier, à ce conte du "Miel", qui me paraît vraiment bon, utile et salutaire. Encore faut-il l'écrire, chauffer le siège des heures durant... Et ici, tiens, une petite voix se manifeste tout de même: lance-toi dans cette écriture, laisse les autres soucis de côté. Ce plaisir te sauvera...
Est-ce bien cela qu'elle me dit?
Quoi qu'il en soit, oui: j'ai envie de reprendre ce récit. D'en faire d'autres. De sortir de moi. Plutôt que de méditer sur le passé. A moins que cette manie me revienne dès demain, et me replonge en moi-même.
Dormons (conseil de Tesla à un ami en difficulté: dormez assez, marchez beaucoup, mangez de manière équilibrée et régulière...)
Indécis, las, inquiet, suis allé ronder dans la ville natale aux alentours de minuit, laissant Clo et les petites dans leur lit.
Toujours ce vague désir de rencontre: maraudage érotique ou autre chose de plus insaisissable? Besoin de communion?
Sur le quai, vacarme absurde et assourdissant d'une techno de plage. Un dimanche soir! Toute la ville basse, en amont jusqu'au pont piétonnier, en dedans jusqu'à la place centrale, et en aval jusqu'au pont neuf, est secouée par ce rythme. Et personne n'y fait rien!
Je rencontre, comme toujours, Branko Badjitch dit Chlog, avec son éternel catogan, son éternel t-shirt et son antique bicyclette de femme. Il pérorait, debout, appuyé au guidon, devant quelques marginaux délavés avoisinant la cinquantaine, affalés sur les bancs du quai. Nous nous saluons comme si nous venions de nous quitter, le matin même. Cela fait pourtant toujours un an ou deux de distance...
Il ne change pas. Un demi-siècle et toujours le hippie hors d'âge. Chanteur de hard-rock, et pourtant abstinent, ne boit pas, ne prend aucune drogue, ne fume pas... Quelque chose de saint en lui. Un esprit vif, intelligent, mais sautillant, incapable de se fixer. Ses coq-à-l'âne finissent par lasser.
J'étais sorti, aussi, afin de "prendre quelques résolutions" au fond de mon désespoir (aussi bien intérieur, personnel et professionnel, qu'extérieur face à la décomposition de tout). Me disais que je ferais bien d'écrire un bilan de ma vie. Qui suis-je, dans le fond? Noter les origines ambiguës, catholiques et orthodoxes, croates et serbes, chrétiennes et communistes, le déchirement entre deux mondes, les gros vices personnels et les phobies, la paresse, l'indécision, l'oblomovisme. Faire le point sur l'apport familial. M'interroger sur ce que je veux vraiment et les moyens d'y parvenir.
Prié tout le long du chemin. Seigneur, emplis de vie ce mollusque, cette méduse à forme humaine, donne-moi d'épauler autrui plutôt que d'en attendre mon mouvement. Donne-moi d'être aimable, que mon énergie suscite l'élan des autres et mérite le sacrifice...
On m'avait dit, dans les mois d'hésitation après le départ de l'Age d'Homme: écoute ta voix intérieure, et suis-là. Or, soyons francs: elle ne m'a rien dit. Je n'ai fait que suivre la pente tracée par le passé et par le ressentiment. Fallait oser en faire table rase...
Seule lueur dans le marasme: le retour, hier, à ce conte du "Miel", qui me paraît vraiment bon, utile et salutaire. Encore faut-il l'écrire, chauffer le siège des heures durant... Et ici, tiens, une petite voix se manifeste tout de même: lance-toi dans cette écriture, laisse les autres soucis de côté. Ce plaisir te sauvera...
Est-ce bien cela qu'elle me dit?
Quoi qu'il en soit, oui: j'ai envie de reprendre ce récit. D'en faire d'autres. De sortir de moi. Plutôt que de méditer sur le passé. A moins que cette manie me revienne dès demain, et me replonge en moi-même.
Dormons (conseil de Tesla à un ami en difficulté: dormez assez, marchez beaucoup, mangez de manière équilibrée et régulière...)
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