tag:blogger.com,1999:blog-74808081460225737892024-03-19T06:42:57.713+01:00DespoticaLes écrits publics de Slobodan DespotSlobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.comBlogger325125tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-17133599653097685062020-01-06T10:30:00.001+01:002020-01-06T10:30:09.854+01:00La foi est plus efficace que le souci<br />
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<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi6UKb8cAdSE4GEo-IYU1UIK5t8VyVqp3y1008lHLAPcJZ9H0dJjeOU3R4ZRbAUNra_3SO63dv1tvQ7Hg6rpelynxtluoog-q1-6I6Y8UZbgTxPmFH3MH4F6o6JUmjZqgeY-LfDbQiJUZdW/s1600/te%25CC%2581le%25CC%2581chargement.jpeg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="800" data-original-width="545" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi6UKb8cAdSE4GEo-IYU1UIK5t8VyVqp3y1008lHLAPcJZ9H0dJjeOU3R4ZRbAUNra_3SO63dv1tvQ7Hg6rpelynxtluoog-q1-6I6Y8UZbgTxPmFH3MH4F6o6JUmjZqgeY-LfDbQiJUZdW/s320/te%25CC%2581le%25CC%2581chargement.jpeg" width="218" /></a></div>
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<small>« Je vous ai dit cela pour que vous ayez ma joie et que votre joie soit complète. » (Jean 15, 11)</small><br />
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Мoïse ne marche-t-il pas derrière Dieu comme un enfant derrière son père? Ainsi Abraham, Isaac et Jacob. Ainsi Samuel et David. Voyez quels étaient les pires moments de Moïse et de David. N'était-ce pas lorsqu'il perdaient confiance en Dieu et se chargeaient d'innombrables soucis, ne se fiant qu'à leurs propres forces? Et Jésus? N'est-il pas le plus parfait enfant dans son abandon, son obéissance et sa confiance absolus à l'égard de son Père?<br />
<br />
L'Evangile du Christ est joie et non tristesse; soulagement et non fardeau. Mieux vaut, donc, un gramme de foi qu'un chargement de soucis. <br />
Le chrétien qui n'a pas compris cela n'est baptisé qu'à l'eau, et non à l'esprit. <br />
<br />
Le prêtre qui n'a pas compris et adopté cela dégringole tout seul la pente qu'il devrait aider les autres à gravir.<br />
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La bénédiction divine, la paix et la santé accompagnent le serviteur du Christ qui peut crier du fond de son âme: «En vérité, on en fait davantage par la foi que par le souci!»<br />
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<small><small>S. Nicolas Velimirovitch.</small></small></div>
Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-84658628839706862662014-06-28T18:15:00.001+02:002014-06-28T18:16:07.807+02:0028 juin 1914. In memoriam Gavrilo Princip<p><img title="" src="http://note.io/1lXJ3Sl" alt="Gavrilo" /></p>
<p>Gavrilo Princip, dont le nom et le prénom sont à eux seuls un destin et une prophétie, n'avait pas encore vingt ans le 28 juin 1914 lorsqu'il abattit le prince héritier d'Autriche-Hongrie François-Ferdinand et son épouse la comtesse Chotek.</p>
<p>Lors de son procès à l'automne 14, l'Empire, qui exterminait déjà en masse les populations civiles dans la Serbie voisine, avait tenu à persuader le monde de son respect minutieux du droit. Au lieu de le pendre à l'instar de ses camarades révolutionnaires, il condamna cet étudiant mineur à vingt années de bagne.</p>
<p>Mais c'était la pendaison qui était une grâce!</p>
<p>Gavrilo fut claquemuré dans la sinistre forteresse de Theresienstadt (Teresin) en Bohême, celle-là même où les nazis, une génération plus tard, installeraient un camp de concentration modèle pour berner grossièrement la Croix-Rouge. Laquelle, à l'époque, ne demandait qu'à se laisser convaincre. On était entre gens civilisés, n'est-ce pas?</p>
<p>A Teresin, Gavrilo fut assassiné à petit feu par la faim, le froid, l'humidité, les insultes et les mauvais traitements. Amputé, épuisé, il finit par s'éteindre le 28 avril 1917, après avoir professé jusqu'à son dernier souffle sa foi dans la victoire de la Serbie et, avec elle, celle des peuples slaves.</p>
<p>La <em>Jeune Bosnie</em>, dont il avait fait partie, était composée de fous intrépides nourrissant un espoir aussi fou et aussi intrépide. Si l'on oublie aujourd'hui la noblesse de leur cause, c'est parce que les empires ont repris la main. Il est donc utile de rappeler pourquoi ils avaient déposé leurs très jeunes vies. Ils voulaient la libération des peuples, l'égalité des hommes, la dignité pour les plus démunis. Ils étaient paysans, artisans, instituteurs, poètes. Ils comptaient même un futur Nobel, Ivo Andrić. Ils se moquaient des partages religieux, communautaires, ethniques. Ils ne voyaient pas d'autre alternative à la liberté que la mort. Ils nous manquent!</p>
<p><img title="" src="http://note.io/1lXILLr" alt="Gavrilo-Kusturica" /></p>
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<p>Emir Kusturica embrassant le monument à Gavrilo Princip, avril 2014.</p>
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<p>Le romancier américain <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Hans_Koning">Hans Koning</a> (1921-2007) a consacré un roman débordant de <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Duende">duende</a></em> à l'agonie du jeune anarchiste. <em>Death of a Schoolboy</em> (<em>Mort d'un écolier</em>), en attente de publication aux éditions L'Age d'Homme, se termine par la confession d'un des soldats tchèques qui avaient été commis à la garde de Gavrilo.</p>
<hr />
<h3><em>Mort d'un écolier</em></h3>
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<p>Notre Empire s’est effondré et a accepté l’armistice le 3 novembre 1918. C’était un dimanche. J’étais sur le front de Trévise à l’époque, vivant à l’arrière dans un abri de boue, marquant le pas comme un million d’autres hommes craignant d’être abattus pour désertion si nous en sortions un jour trop tôt pour rentrer chez nous. Mais une heure après qu’ils aient sonné le cessez-le-feu il n’y avait plus là âme qui vive. Je n’ai pas réussi à monter sur un fourgon ou dans un train et j’ai marché la plupart du chemin pour rentrer à la maison. Le vingt-cinq novembre j’étais de retour à Theresienstadt.</p>
<p>La ville avait un aspect horrible. Trente centimètres et quelques de boue, des ordures répandues partout, pas d’éclairage dans les rues, pas d’électricité. Aux devantures des magasins on voyait des caisses vides et les boutiques étaient désertes. Des femmes et des enfants gris et en haillons faisaient la queue sous cette foutue pluie en attendant leur ration de pain de soixante grammes de gruau cuit au four. Mais le moral de notre ville était superbe ! La raison en était que les Allemands et les Autrichiens se retiraient. Theresienstadt allait devenir Teresin. Sur la forteresse flottait un nouveau drapeau, rouge, bleu et blanc, le drapeau de la Tchécoslovaquie.</p>
<p>J’aurais aimé aller dans mon ancienne salle de garde chercher les clefs et aller ouvrir la cellule de Princip. Ç’aurait été un beau geste par une journée comme celle-là.</p>
<p>C’était trop tard.</p>
<p>Mais je savais où il était enterré, moi et personne d’autre au monde. Je suis resté seulement une heure auprès de ma famille puis je suis allé au cimetière. C’était au milieu de l’après-midi mais il faisait presqu’aussi sombre qu’en cette nuit d’avril. J’avais la page de mon livret de paye. La porte était là, les tournants et la haie, rien n’avait changé. J’ai tout repensé jusqu’à ce que je sois sûr d’être exactement à l’endroit. Puis j’ai dessiné un cercle dans la terre avec une branche, aussi profond que j’ai pu et je me suis agenouillé et ai dit une prière pour lui. J’ai planté la branche dans le sol. Quand je suis rentré en ville, j’ai vu une baraque où deux femmes étaient en train de vendre le nouveau drapeau tchécoslovaque. Je crois que c’était à peu près la seule chose qui fût en vente libre à Teresin-Theresienstadt à ce moment-là.</p>
<p>Ce n’étaient pas des drapeaux de bonne qualité mais ils n’étaient pas en papier. C’était un exploit. Je me demandai où elles s’étaient procuré le tissu.</p>
<p>Je m’arrêtai et les regardai un moment. Ça n’était pas des drapeaux serbes, bien sûr. Le dessin était différent. Mais les couleurs étaient les mêmes, rouge, bleu, blanc. J’en ai acheté un et je l’ai rapporté à la maison. Ils ont cru que j’étais fou mais j’ai attendu que ma sœur le coupe et le recouse. Je n’ai même pas ôté mes bottes.</p>
<p>Puis dans la dernière lumière du jour, avec un peu de soleil rouge perçant à travers ces nuages de pluie, je suis reparti pour un dernier tour au cimetière. Ma branche s’était déjà couchée et je l’ai jetée. J’avais apporté une ficelle et un piquet pris dans la boîte à outils de mon père et, au-dessus du corps de Princip, j’ai planté le drapeau de la Serbie. •</p>
</blockquote>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-12396252097875938812014-06-10T00:59:00.001+02:002014-06-10T00:59:03.681+02:00Webdestinées<p>Une histoire cruelle et poétique à la fois, tirée de la vie des gens ordinaires — qui est comme on le sait le plus invraisemblable puits de paradoxes et de fantaisies.</p>
<p>Emilie était une jolie fille, mais elle travestissait son visage sur les sites de rencontres. Un soir, elle donna rendez-vous sur la terrasse d'un café à deux web-soupirants à la fois. Elle choisit de se révéler à celui des deux qui avait apporté des fleurs. Elle posa un lapin à l'autre, pourtant assis à la table voisine.</p>
<p>Aujourd'hui, l'homme aux fleurs est son mari et le père de ses enfants.</p>
<p>L'homme sans fleurs, lui, n'a jamais vu son visage. Il est convaincu aujourd'hui encore, s'il se souvient de cet épisode, que la jeune femme n'est jamais venue à leur rendez-vous.</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-81850732237252378032014-05-21T06:41:00.001+02:002014-05-21T06:41:11.408+02:00Smrt poslednjeg velikana srpske književnosti (Figaro Vox, 19.5.2014)<h1>DOBRICA ĆOSIĆ: SMRT POSLEDNJEG VELIKANA SRPSKE KNJIŽEVNOSTI</h1>
<p><strong>Žan-Kristof Buison (Jean-Christophe Buisson)</strong></p>
<p><strong>Pisac i novinar Figaro Magazina, Žan-Kristof Buison, odaje počast Dobrici Ćosiću, srpskom piscu i bivšem predsedniku Jugoslavije, koji je preminuo u nedelju, 18. maja, u 93. godini.</strong></p>
<p>Nesreća nikad ne dolazi sama. Posebno na Balkanu. Srbija, koju poslednjih nedelju dana pustoše poplave biblijskih razmera, u nedelju, osamnaestog maja, izgubila je svog poslednjeg književnog velikana. Dobrica Ćosić, koji je umro u snu u 93. godini, svojim opusom koji čine desetine hiljada gustih epskih stranica, slovi za srpskog Solženjicina. Poput autora Arhipelaga gulaga, i Ćosićeva književna ambicija zadire u istoriju, nacionalni identitet, rat i politiku. Poput ruskog pisca, i Ćosić trpi osude zapadnjačke inteligencije koja ipak bira da se ne meša u jugoslovenska pitanja umesto da se potrudi da ih shvati.</p>
<p>Rođen 1921. u Kraljevini Srba, Hrvata i Slovenaca pod vladavinom kralja Aleksandra, Ćosić je bio Srbin, ali to je shvatio tek u zrelom dobu. Kao mladić, bio je partizan i učestvovao u Titovom pokretu otpora, a potom, posle rata, u izgradnji komunističke Jugoslavije. Nakon toga je uvideo da je njen federalizam samo izgovor da se smrvi Srbija u okrilju jedne superstrukture s velikom verovatnoćom unutrašnjeg etničko-religioznog raspadanja. Isključen kao disident iz Saveza komunista 1968, pošto se usprotivio da se Kosovu pruži autonomni status (što je, prema njemu, bio preludijum razvoju albanskog nacionalističkog pokreta za nezavisnost: događaji će pokazati da je bio u pravu...), u narednim godinama se opredelio za srpski nacionalizam, koji će ga dovesti do sumnjivih i problematičnih poteza. Kao Miloševićeva podrška, našao se na čelu Savezne republike Jugoslavije između juna 1992. i juna 1993, usred rata s Hrvatskom i BiH. Deset godina kasnije, učestvovao je u obaranju istog tog Miloševića, pružajući podršku pokretu opozicije Otpor, ali će se i od njega distancirati saznavši da ga finansiraju fondacija Soros i drugi strani fondovi.</p>
<p>Ćosić nije govorio samo o Srbiji razorenoj ratovima, kobnim ideologijama i izgubljenim iluzijama. Njegove teme su se doticale i kraja tradicionalne, seljačke, marljive i pragmatične Evrope, izjedene napretkom i tehnikom, hobijima i utopijima.</p>
<p>Koliko se iščuđavalo njegovim političkim zaokretima i angažovanjima, koliko su izazivali nelagodu i osudu, toliko su njegovi romani bili vredni divljenja. Pripovedajući u sagi o porodici Katić istoriju svoje zemlje u XX veku, Ćosić nije govorio samo o Srbiji razorenoj ratovima, kobnim ideologijama i izgubljenim iluzijama. Njegove teme su se doticale i kraja tradicionalne, seljačke, marljive i pragmatične Evrope, izjedene napretkom i tehnikom, hobijima i utopijama. Time njegov romansijerski opus tolstojevske intonacije dostiže univerzalnost. Njegova lucidna melanholija podseća na melanholiju Ive Andrića, ali on se od autora romana Na Drini ćuprija razlikuje izuzetnim narativnim smislom za epopeju. Sva poglavlja Ćosićevih knjiga puna su krvi i znoja, suza i nepravde, izdaja i tragedija; ali u njima ima ogromne i bolne zapitanosti: gde se u našim najgnusnijim delima krije udeo čovečnosti?</p>
<p>Neka nam bude dozvoljeno da ovde iznesemo jednu ličnu uspomenu. Nekoliko sati posle petooktobarske revolucije 2000. kojom je svrgnut Slobodan Milošević, želeo sam da napravim intervju s čovekom koji se, uspevši da zbaci tiranina Jugoslavije posle Tita, spremao da svoju državu vrati među demokratske zemlje: reč je o Vojislavu Koštunici. Sastanak s njim koji je doveo do toga da <em>Figaro Magazin</em> objavi prvi međunarodni intervju novog srpskog predsednika, omogućio mi je Dobrica Ćosić. Zajedno s njegovim sjajnim prevodiocem, Slobodanom Despotom, sreli smo se prethodnog dana u predvorju hotela Palas, na čašici šljivovice. Te večeri je pogled pisca, sedog starca od skoro osamdeset godina, otkrivao odlučnost, ponos i toplinu. Iznenada mi se učini da preda mnom sedi jedan od junaka njegove monumentalne istorijske sage, izbegao iz sela Prerova. Ćosić je sada negde gore, među svojim junacima, veoma visoko.</p>
<ul>
<li><em>Vreme smrti, Vreme zla, Vreme vlasti, Vreme vlasti 2</em> (prevedeno kao <em>Le temps de l’imposture ou le roman de Tito</em>), objavljeni su kod izdavača L’Age d’Homme.</li>
</ul>
<p>(<a href="http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2014/05/19/31002-20140519ARTFIG00127-dobrica-262osi263-le-dernier-geant-des-lettres-serbes-est-mort.php">Le Figaro/Vox</a>, 19.5.2014. Prevod s francuskog: J. K.)</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-1685927063341594752014-04-28T00:39:00.001+02:002014-04-28T00:43:51.034+02:00"Le Miel" au Salon du Livre de Genève 2014<p>Pour la première fois, je participe cette année au <a href="http://www.salondulivre.ch/fr/">Salon du Livre de Genève</a> en tant qu'auteur, et non comme éditeur.</p>
<p>Les rendez-vous du <em>Miel</em> sont les suivants:</p>
<h3>Jeudi 1er mai</h3>
<blockquote>
<p><strong>10h15 – 12h15</strong> : « Prenez le temps de lire » sur le <strong>stand France Loisirs (G710)</strong> avec Georges Pop, Daniel Marguerat et Luc Debraine</p>
</blockquote>
<h3>Samedi 3 mai</h3>
<blockquote>
<p>12h00-12h30 : <strong>La Place Suisse (P1671)</strong> « Focus sur un auteur Suisse » <br />12h30-13h00 : signature sur ce même espace <br />16h00-17h30 : dédicace sur le <strong>stand Gallimard (H870)</strong></p>
</blockquote>
<p> </p>
<p>NB</p>
<p>Tous les rendez-vous liés à mon roman sont annoncés sur <a href="http://miel.postach.io/agenda">l'agenda</a> du minisite miel.postach.io.</p>
<p>L'actualité des éditions Xenia est, elle, à suivre sur le tout nouveau <a href="http://www.editions-xenia.com/">site</a> des éditions!</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-36170226177914831012014-04-18T18:40:00.001+02:002014-04-21T14:55:05.935+02:00Quand un père doit baptiser seul son bébé mourant<p><em>En guise d'office du Vendredi saint, je traduis ce texte bouleversant publié ce jour par mon ami Dragoslav Bokan.</em></p>
<p>*</p>
<p>En 1993, dans la nuit du Vendredi au Samedi Saint, mon fils Vlad âgé de trois jours est décédé dans l’hôpital de la rue Reine Nathalie, à Belgrade. Au moment précis du passage sous le linceul du Christ, le petit martyr et grand combattant a quitté ce monde. Né avec une blessure causée par l’accouchement, il avait passé pratiquement toute sa courte vie à pleurer dans de terribles douleurs. C’est à peine s’il se calmait un peu dans son sommeil. Je suis parvenu à le baptiser, à la place du prêtre (l’entrée de la maternité leur était interdite), et sur le conseil de l’évêque (à l’époque hiéromoine) Ignace, qui était le confesseur des moniales du monastère de la Présentation de Marie et que j’étais allé consulter sur les mesures à prendre pour sauver l’âme de mon fils.</p>
<p>Lorsque je suis entré dans la chambre où gisait Vlad (avec deux « témoins », ses parrains), il dormait, épuisé par ses souffrances. Il était calme, ne semblait même plus respirer. Je me suis dressé devant lui, en uniforme, et j’ai tracé le signe de la croix en l’air au-dessus de son front. A cet instant précis, il a ouvert les yeux et m’a regardé. Sans pleurer, pour la première et dernière fois, il m’a regardé, droit dans les yeux.</p>
<p>C’était comme si le rayon de lumière de ses petits yeux bleus (qui brillaient comme des diamants) avait pénétré, à travers mes pupilles, dans mon cœur et l’avait embrasé. Cette interminable seconde d’un regard qui dure encore dans ma mémoire a transformé le temps en éternité, et cette chambre d’hôpital en Temple. J’ai baissé mon bras (arrêté net dans son mouvement par ce regard), et après avoir à peine pu prononcer la première phrase du sacrement de baptême, je me suis mis à pleurer. Sans sanglots, sans le moindre bruit, mon visage avait soudain été inondé de larmes, comme si l’on avait projeté un voile d’eau sur mes yeux, mes joues, ma barbe… Je ne voyais plus rien, sauf cette lumière mystique et pénétrante des yeux bleus de mon fils agonisant, Vlad.</p>
<p>Comme si ç’avait été lui qui m’avait donné sa bénédiction.</p>
<p>J’ai déposé une petite icône de la Mère de Dieu dans ses langes, et, ne pouvant plus y tenir, je me suis littéralement précipité hors de ce triste et grandiose baptistère. Jamais de ma vie je n’ai pleuré autant. Et jamais je n’ai rien ressenti de plus terrible que cette muette conversation des regards. La seule conversation que nous ayons jamais eue.</p>
<p>C’est ainsi que fut baptisé mon petit, mon premier enfant.</p>
<p>Je l’ai enterré, avec la bénédiction de Mgr Irénée, au monastère des Saints-Archanges de Kovilj, et planté sur sa tombe une croix de marbre blanc gravée de lys et de paroles d’Évangile. Mon petit combattant, Vlad, avait résisté jusqu’à son baptême et témoigné, pendant ces trois jours de souffrances, de choses qui nous sont inaccessibles et mystérieuses. Et moi, j’avais dû littéralement user de menaces, au pistolet et à la grenade, dans ce sinistre hôpital privé de Dieu, pour pouvoir entrer dans sa chambre et le baptiser. Personne, à ma connaissance, ne l’avait jamais fait avant moi. Car personne ou presque ne sait qu’il est possible de baptiser quelqu’un sans la présence d’un prêtre, en des cas comme celui-ci. Je l’ignorais moi aussi, jusqu’à ce que la main de Dieu m’en ait instruit en me menant au lieu précis où je devais l’apprendre.</p>
<p>Lorsque j’ai su que le petit être allait mourir, je me suis mis à errer comme un fou dans les rues de Belgrade. Je fuyais la maternité, n’importe où… le plus loin possible de l’endroit où j’avais appris l’horrible nouvelle. Comment j’ai fait pour ne pas me faire écraser, Dieu seul le sait. Je marchais, j’errais ainsi, sans savoir où j’allais ni ce que j’allais devenir.</p>
<p>A un moment donné, en levant le regard, j’ai vu l’église du saint Empereur Constantin et de la sainte Impératrice Hélène, à Voždovac. Aujourd’hui encore, j’ignore comment j’étais arrivé là, et pourquoi justement là. J’avais vécu dans le voisinage de cette église dans mon enfance, fréquentant l’école Karageorges voisine, et puis j’avais chanté dans le chœur de Pavle Aksentijević lors de la consécration des étranges et flamboyantes fresques de Militch de Matchva.</p>
<p>J’ai pénétré, confus, dans l’église. Comme si c’était la première fois. Tout me paraissait différent et altéré, comme dans un rêve. Je me suis approché du guichet où l’on vend les cierges, j’en ai pris un petit en cire, et puis j’ai demandé la revue « Hilandar » qui était exposée un peu sur le côté. Je n’avais ni l’envie ni la force de lire quoi que ce soit. Je ne sais pas pourquoi j’ai demandé cette revue (ni comment j’avais fait pour l’apercevoir), mais c’est ce que j’ai fait. Totalement inconscient, porté par une volonté étrangère et bien plus forte que la mienne. J’ai ouvert « Hilandar », vers le milieu, et j’ai découvert un article parlant d’un hiéromoine russe qui visitait les maternités pour y baptiser les nouveau-nés mourants et sauver leurs âmes.</p>
<p>Je ne croirais pas mon récit, si je ne l’avais moi-même vécu.</p>
<p>Après cela, je suis allé à la Présentation pour y recevoir la bénédiction d’Ignace.</p>
<p>C’est ainsi que fut baptisé le petit Vlad Bokan, ma bénédiction céleste, qui depuis lors me suit et me garde.</p>
<p>PS</p>
<p>Un jour, il y a longtemps, ma petite Sophie, (née exactement un an et demi après), lors d’une promenade, m’avait demandé de lui acheter un ballon coloré rempli d’hélium. Lorsqu’elle l’a obtenu, elle l’a aussitôt laissé monter dans les airs en disant d’une voix calme et grave : « Ça, papa, c’est pour mon frérot Vlad. Pour qu’il ait de quoi jouer là-haut au ciel…*</p>
<p>En regardant le petit ballon de Sophie monter au ciel et diminuer petit à petit, jusqu’à n’être plus qu’un petit point dans les nuages blancs, j’ai senti que son frère était vivant et qu’il veillait sur nous.</p>
<p>Et puis, de nouveau, ces larmes…</p>
<p style="text-align: right;">(Dragoslav Bokan)</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-27096241059448549172014-03-21T20:04:00.000+01:002014-03-22T20:05:16.770+01:00Thomas MertonLe grand plaisir du lecteur: découvrir sur le tard une œuvre immense et surprenante.
J'entame ainsi ces jours-ci la lecture de Thomas Merton, le plus zen des chrétiens, et tombe sur une notice biographique qui me frigorifie.
L'un des plus grands spirituels du XXe siècle occidental est mort dans sa chambre d'hôtel en Asie, électrocuté par un ventilateur défectueux. Dans son cas, une véritable mort de martyr (témoin). Martyr de la société industrielle, qui s'emploie à éradiquer toute vie intérieure.Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-49238164993322669582014-03-17T19:58:00.000+01:002014-03-22T19:58:42.220+01:00Los Cristeros, film maudit?<p> </p>
<p><img src="http://lh3.ggpht.com/-ocalTScFy54/Uy3dWzXigGI/AAAAAAAAAcM/okEry_utugQ/Cristeros.jpg?imgmax=800" alt="Film Cristeros" width="540" height="466" border="0" /></p>
<p> </p>
<p>C'est vrai: pourquoi passe-t-on sous silence, en France, <a href="http://www.cristeros-lefilm.fr/">cette belle épopée</a>, magnifiquement tournée, avec de grands acteurs — dont Peter O'Toole dans un de ses derniers rôles? Je me le demande et aussitôt une réserve surgit: toute insurrection soutenue par l'Eglise catholique recèle des coulisses politiques qui la rendent sujette à caution…</p>
<p> </p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-31124494584717587862014-03-11T23:51:00.000+01:002014-03-22T19:58:56.661+01:00Un chœur russe égaré en ValaisUn chœur de St-Pétersbourg égaré à St-Pierre, via une discrète filière paroissiale. Ma mère nous y a convoqués, Xenia et moi, au dernier moment, voyant le peu de public.
A peine plus de spectateurs que de choristes dans la vieille église. Et pourtant, des moments divins! Liturgies de Rachmaninov, de Leonind Andreiev, etc. Les larmes montent, comme si je pelais des oignons. Je ferme les yeux. Quelqu'un me dit qu'on aurait besoin d'un interprète pour l'après-concert. Or je n'ai pas envie de parler avec ces gens, ni de les rencontrer.
La musique russe est au-delà des hommes et des femmes qui l'interprètent. C'est un chant surgi du fond des siècles. Liturgique même lorsqu'il parle de beuveries.
Je leur parlerai pourtant: à la sortie, ils tendent un panier et vendent leurs CD. J'emprunte 100 francs à ma mère pour acheter quelque chose et leur donner le reste. Le ténor, qui est à la caisse, me regarde: vous êtes russe? Non. Slave en tout cas, me dit-il. Je vous avais repéré. Les Slaves vivent la musique autrement. Pas le temps de lui expliquer qui je suis ni comment je me situe.
Personne n'a fait la moindre publicité pour cet excellent chœur. Devant l'église, un minibus rouge les attend pour une prochaine destination, une autre paroisse désaffectée de Burgondie.
(Note de journal, 11 mars 2014)Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-43581814877918366662014-02-24T00:53:00.001+01:002014-02-24T06:52:24.213+01:00L'école selon M. Gabbud<p>M. Jean-Yves Gabbud, qui fut rédenchef par intérim du <em>Nouvelliste</em>, est en train de s’acheter une virginité en <a href="http://www.lenouvelliste.ch/fr/valais/valais/oskar-freysinger-cite-en-exemple-l-urss-498-1264842">brocardant Oskar Freysinger</a> pour ses <a href="http://ofreysinger.ch/component/content/article/20-politicien/conseil-d-etat/formation/40-ecole">idées sur l’école</a>. Il lui reproche de «citer en exemple l'URSS» tout en égratignant au passage ma personne pour un avis exprimé via Tweeter sur les événements d'Ukraine.</p>
<p>Tout ceci, bien entendu, dans le même article, afin de respecter la sacro-sainte unité de sujet qui est le B.A.-BA du journalisme. Quel rapport entre les doctrines pédagogiques et le renversement de Yanoukovitch? Aucun, sinon le besoin, monté du cerveau reptilien, de plaire à ses maîtres en plantant une volée de fléchettes dans les cibles habituelles. «Voyez comme je les ai bien épinglés! Et les deux d’un coup!» Comme diraient les pilotes de F1, un bolide se pilote «par l'arrière-train»: certaines carrières dans le journalisme aussi.</p>
<p>M. Gabbud n’y a sans doute pas réfléchi, mais le texte d’Oskar Freysinger sur l’école avait précisément pour but de susciter des réactions sur le sens et le fond de son travail à la tête du Département de la Formation et de la Sécurité, et non plus sur des polémiques administratives. Sous la direction temporaire de M. Gabbud, à l'automne 2013, le <em>Nouvelliste</em> — la <em>Pravda</em> valaisanne — s'est en effet quasi-exclusivement concentré sur des restrictions budgétaires dont ni Oskar Freysinger, ni personne d'autre dans son département n'est responsable, mais que lui, ses chefs de service et ses professeurs sont obligés d'<a href="https://www.youtube.com/watch?v=Xc0Eoq10bH8&feature=c4-overview&list=UUBkD3PTWpXErgiE1TzMgoFw">appliquer à leur corps défendant</a>. En sachant parfaitement le dégât que chaque million d'épargne infligerait à la qualité des prestations d'un département déjà soumis au «personal-stop».</p>
<p>Les économies douloureuses imposées aux domaines-clefs que sont la Formation/Sécurité de Freysinger et la Santé de Mme Waeber-Kalbermatten sont un symptôme et une conséquence de la marche du gouvernement cantonal dans son ensemble, au sein duquel ces deux grands ministères ne disposent que de postes «dépenses» mais pratiquement d'aucun poste «revenu». Le problème de la santé vient d'être mis sur le tapis ces derniers jours. Celui du DFS a fait les grands titres et les «unes» du <em>Nouvelliste</em> au temps où il était dirigé par M. Gabbud. Celui-ci a systématiquement donné la parole aux critiques d'Oskar Freysinger au sein du Grand Conseil, des gens souvent mûs par une animosité personnelle évidente à son égard et pratiquant une non moins voyante tactique d'obstruction.</p>
<p><img title="" src="http://note.io/1e7UaF4" alt="Budget-NON" /></p>
<p>Oubliant son devoir d'information et d'impartialité, le <em>Nouvelliste</em> de M. Gabbud s'est bien abstenu, tout au long de la crise budgétaire, de commenter cette tactique et de placer le problème de la formation dans sa vraie perspective, qui est une affaire de gouvernance générale: peut-on régir harmonieusement un Etat en distribuant de rigides et inégales «enveloppes» d'austérité aux divers dicastères — sans fixer de priorités aux tâches de l'Etat — puis en les laissant se débrouiller <em>seuls</em> face aux médias et à l'opinion? Aucune tribune, aucune analyse, aucune voix durant toute la crise du budget pour rappeler cette vérité élémentaire: le budget est une affaire du Gouvernement <em>et</em> du Parlement, et <em>ensuite seulement</em> d'un chef de département particulier.</p>
<p>Malgré les communiqués (mal relayés ou ignorés) du Département, malgré mes lettres personnelles à Jean-Yves Gabbud des 5 et 6 décembre 2013 attirant son attention sur cette déformation flagrante de la réalité, le <em>Nouvelliste</em> qu'il dirigeait a poursuivi sur sa ligne, laissant dire et croire que, au final, le professeur Freysinger avait une «dent» contre l'école, ou qu'il souffrait d'ultralibéralisme. Lorsque Freysinger a proposé un premier train de mesures «soft» — l'augmentation des amendes d'ordre et de la modique participation des entreprises au financement des crèches ainsi que la réduction des bourses d'études —, le <em>Nouvelliste</em> s'est fait la tribune d'une véritable bronca d'indignation parlementaire, politique et syndicale sans jamais se demander ce que le DFS pouvait faire <em>d'autre</em>. Ni relever que les coupes — <a href="http://www.laliberte.ch/canton/le-corps-enseignant-est-attaque">toujours impopulaires</a> — dans l'instruction publique demeurent le dernier recours de tout gouvernement, de droite comme de gauche, contraint à des économies d'échelle.</p>
<p><img title="" src="http://note.io/1e7Usf0" alt="L'école doit économiser 5 millions" /></p>
<p>Ce train de mesures fut rejeté sans aucune proposition constructive du Parlement. L'inertie du Grand Conseil fut soigneusement occultée par le <em>Nouvelliste</em> qui ne posa pas non plus alors les questions élémentaires: qui était responsable de l'austérité? Qui avait proposé des issues? On oubliait tout le fond du débat pour se focaliser sur la personne d'Oskar Freysinger. Il eût été facile pour le quotidien cantonal de pondérer cette polémique en rappelant les faits essentiels. Au contraire de cela, le <em>Nouvelliste</em> de M. Gabbud a joué la démagogie, dénigrant le travail du ministre de la Formation à chaque fois qu'il pouvait le faire.</p>
<p>Telle fut, en résumé, la contribution personnelle de M. Gabbud au débat sur l'école au temps où il était aux affaires. Qu'il soit le premier à s'être laissé piéger par le paradoxe soviétique, tout en tombant dans l'amalgame le plus grossier, jette une lumière féroce sur son intégrité professionnelle, sa curiosité intellectuelle et ses capacités d'analyse et d'anticipation. •</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-21674783277525884562014-02-05T23:12:00.001+01:002014-02-05T23:12:53.021+01:00Soirée «Le Miel» le 8 février à Paris<p>Présentation du roman <em>Le Miel</em> de Slobodan DESPOT (Collection Blanche, Gallimard, 2014) avec <strong>Jean-Christophe BUISSON</strong>, écrivain et journaliste au «Figaro Magazine».</p>
<blockquote>
<p><strong>Centre culturel de Serbie (123, rue St-Martin, en face du Centre Georges-Pompidou), le samedi 8 février dès 19h30. Entrée libre</strong></p>
</blockquote>
<p><img title="" src="http://note.io/1kVocND" alt="Invitation CCS - Le Miel, 8.2.14" /></p>
<h3>NOTE : prochaine soirée «Le Miel»</h3>
<p>Mardi 11 février à la grande <strong>Librairie Kléber de Strasbourg</strong>! http://www.librairie-kleber.com</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-83041705481190784882014-01-24T08:50:00.001+01:002014-01-24T09:08:03.108+01:00Une fable valaisanne<p><img title="" src="http://note.io/1c9Clo4" alt="Nouvelliste-une-Cleusix-Leytron" /></p>
<p>Cela fait une semaine que le maire de Leytron sonne le tocsin à cause des impôts supposément impayés du contribuable Jean-Marie Cleusix.</p>
<p>Mais voici qu'il ne veut plus de son argent! Pourquoi alors tout ce tonitruant déballage d'affaires privées, sinon pour détruire un homme? Ses appels au civisme, au bout du compte, n'auront servi qu'un règlement de compte personnel.</p>
<p>Etourdi par la chaleur des projecteurs, le Martinet a trop agité ses ailes. L'oiseau n'a pas vu venir la vitre. Il a tapé dedans et maintenant il est mort.</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-85182677552719688342013-11-11T15:12:00.001+01:002013-11-11T15:12:59.651+01:00Une mégamanif dans le "Nouvelliste"!<p>Le <em>Nouvelliste</em> de ce jour accorde tout l'espace rédactionnel de sa page 7 à une manifestation qui a réuni… dix personnes sur la place de la Planta samedi dernier, le 9 novembre!</p>
<p>Ce même jour, fête de la St-Martin, des dizaines d'autres rassemblements, dans le canton et ailleurs, drainaient des centaines de personnes.</p>
<p>L'alternative sociale et libertaire, elle, aurait espéré mobiliser 20 personnes. Pas de chance: ils ne furent que 10. Mais rattrapage in extremis par le <em>Nouvelliste</em> qui accorde une tribune royale à ce groupement bas-valaisan marginal et assez cocasse. Sa page Facebook nous présente son logo, un patchwork entre une étoile verte, un arc-en-ciel, un "A" anarchiste et… le marteau et la faucille soviétiques, emblèmes d'un des régimes les plus sanglants et les plus ineptes qu'ait connus l'humanité.</p>
<p><img title="" src="http://note.io/17qiwbv" alt="ASL" /></p>
<p>La journaliste, Mme Savioz, aurait dès lors pu s'interroger sur la crédibilité des slogans de "non-violence" de ce micro-mouvement pittoresque. Elle aurait pu relever la contradiction entre cette pose de vertu et le refus catégorique des organisateurs d'entrer en dialogue avec le ministre qu'ils contestent. Elle aurait pu leur faire observer que la cause de leur mobilisation — la restriction des bourses d'études — n'est qu'une des facettes, certes douloureuses, des coupes budgétaires décidées par le Conseil d'Etat valaisan dans son ensemble et non par l'obscurantisme arbitraire du seul Oskar Freysinger! Elle aurait pu signaler que la manifestation n'avait pas été autorisée. Elle aurait pu… Elle aurait pu... <strong>Elle aurait pu, surtout, relever que ce happening avait été délibérément agendé un samedi après-midi, un moment où les manifestants étaient certains de ne pas croiser Oskar Freysinger (ni aucune autre autorité politique) dans le centre-ville de Sion entièrement adonné, en ces heures-là, au vice capitaliste du shopping!</strong></p>
<p>Courageux mais pas téméraires, non-violents mais peu dialogueurs, populistes mais guère populaires, déterminés mais pas cohérents, nos anarchistes ont trouvé dans le <em>Nouvelliste</em> un relais à la hauteur de leur prestation!</p>
<p><img title="" src="http://note.io/17qiKQ4" alt="Nouvelliste, 11.11.13" /></p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-25990212067545554062013-10-07T00:45:00.001+02:002013-10-07T00:45:23.052+02:00Une croix dans la nuit<p>Ce dimanche 6 octobre 2013, à 21h précises, dans l'obscurité complète, quelque 5000 citoyens de la ville serbe de Niš ont tracé une gigantesque croix lumineuse aux abords de la nouvelle église de l'empereur Constantin et de l'impératrice Hélène, où se tiendra demain la sainte liturgie marquant les 1700 ans de l'édit de Milan. Le mot d'ordre du rassemblement était : « Je fais partie de la croix, moi aussi ! »</p>
<p><img title="" src="http://note.io/GD2ui7" alt="Krst u Nišu" /></p>
<p>Pour mémoire, l'édit de Milan, promulgué en 313 par l'empereur Constantin Ier, accordait la liberté de culte à toutes les religions de l'Empire et abolissait l'obligation faite aux chrétiens de vénérer l'empereur comme un dieu, obligation qui avait, des siècles durant, assuré une riche pitance aux fauves des cirques impériaux.</p>
<p>Il est incroyable — et en même temps sans doute significatif — que les pays orthodoxes, en en premier lieu la Serbie, soient les seuls à commémorer cet événement qui fonda la civilisation chrétienne.</p>
<blockquote>
<p>(adapté de <a href="http://www.pressonline.rs/info/drustvo/288011/nislije-formirale-ljudski-svetleci-krst-u-mraku-.html">pressonline.rs</a>)</p>
</blockquote>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-883646033392831352013-08-27T15:36:00.001+02:002013-08-27T15:36:17.996+02:00A quoi le "Temps" passe son temps (chap. 2 et fin: la partie grave)<p><img title="" src="http://note.io/17admzy" alt="Despot-LeTemps-130827" /></p>
<p>En tant que futur chargé de communication du Conseiller d’État Oskar Freysinger, je suis tenu à la réserve sur les sujets qui concernent ma future fonction.</p>
<p>Mais cette fonction future ne débutera que le 1er septembre à minuit. D’ici là, je profite de ma pleine liberté de parole pour dénoncer une publication discriminatoire à l’encontre de ma personne.</p>
<p>Depuis des semaines, quelques journalistes harcelaient Oskar Freysinger et moi-même à propos d’un sujet sans aucun rapport avec nos préoccupations actuelles, mais clairement lié à une volonté de lui nuire et de me nuire. Nous n’avons évidemment pas donné suite à ces sollicitations.</p>
<p>Suite à l’annonce de notre future collaboration, via un communiqué du DFS valaisan émis hier 26 août à 18 heures, la correspondante valaisanne du « Temps » m’a appelé pour m’interroger sur mes relations passées, actuelles et futures avec mon ami, auteur et mandant Oskar Freysinger. A en juger par ses questions, et surtout le ton sur lequel elles étaient posées, tous les aspects de ces relations étaient suspects et, quelque part, répréhensibles. Mais « quelque part », c’est nulle part, et il n’y avait au fond rien de contestable à ce qu’un ministre engage à son service, par une procédure ordinaire, une personne de confiance qu’il juge utile à son travail. Tous le font, seul Freysinger est questionné. S’il fallait justifier un poste de délégué à la communication, ce seul cas de pression médiatique pourrait servir d’argument.</p>
<p>Or la question y relative — « Comment peut-il engager un collaborateur de plus quand il doit économiser 25 millions sur son budget » — m’avait paru si puérile que j’y avais répondu par une boutade. Laquelle s’est retrouvée dans l’article. Mais là n’est pas le hic.</p>
<p>Le hic — et même le hoquet, à l’autre bout du fil — est apparu lorsque, interrogé sur mes propos prétendument « négationnistes » à propos de Srebrenica, j’ai fait remarquer à la journaliste du « Temps » que ces propos, qu’un quotidien alémanique a déterrés voici quelques semaines, étaient tirés de son propre journal ! L’argument-clef de l’<em>Arbeitsverbot</em> intenté par des journalistes désireux de téléguider les choix d’un ministre élu tenait, en réalité, dans quelques questions logiques que j’avais posées dans une tribune du « Temps » du 1er juin 2011 — et dont je n’ai plus entendu parler autrement qu’en bien, puisqu’elle fut traduite dans au moins quatre langues. « La Boîte de Pandore du conflit bosniaque » énumérait certaines questions que le tribunal de La Haye devrait forcément se poser lors du procès du général serbe Ratko Mladić. Un procès, soit dit en passant, qui péclote et dont les médias ne parlent guère, alors qu’il est censé sanctionner, justement, le responsable du « plus grand massacre depuis la IIe guerre mondiale » (si l’on excepte ceux commis par les Américains, qui sont hors compétition).</p>
<p>Ainsi donc, si j’étais vraiment un « négationniste » <em>(« Genozid-Leugner »)</em> comme m’en accusait un article idiot du « Tages Anzeiger », c’était « Le Temps » qui avait servi de canal à mon négationnisme. Le délateur du « Tagi », sans doute conscient du problème, avait omis de citer sa source. Sa collègue du « Temps », elle, n’avait pas fait l’effort de la retrouver. Elle avait probablement retraduit de l’allemand des citations tronquées. Voilà tout le soin qu’elle a mis à esquisser mon portrait.</p>
<p>Mais c’était bien suffisant au vu du but visé. Le but de son appel, et de son article, n’était pas d’informer sur l’interlocuteur, mais de le faire « trébucher » (le verbe apparaît au dernier paragraphe). Comme si l’information, au « Temps », relevait d’un art martial. Mais comme la peau de banane, somme toute, était plutôt inoffensive, on a rajouté une couche dans le chapeau même de l’article : « L’éditeur serbe sera le chargé de communication » de qui vous savez. Serbe. Srebrenica. Massacre. Pavlov. <em>Arbeitsverbot</em> !</p>
<p>Hélas, madame Parvex, hélas, chers humanistes ouverts et tolérants du « Temps », il se trouve que je suis suisse. La dernière fois qu’on m’a contesté cette appartenance, c’était au recrutement, où un colonel particulièrement obtus (un <em>facho</em> dans le vocabulaire de gauche), était sorti de ses gonds parce que je lui répondais et m’avait recommandé de « rentrer dans mon pays ». « Justement: mon pays, c’est ici ; et la preuve, c’est que je me trouve devant vous », fut ma dernière réplique avant l’envoi dans une caserne alpine redoutée où j’allais avoir un grave accident. Elle m’a coûté cher, mais elle m’a ancré dans cette identité qui est aujourd’hui la mienne. Mon livre le plus lu, <em><a href="http://www.editions-xenia.com/livres/valais">Valais mystique</a></em>, un succès populaire et critique dont Mme Parvex s’est bien gardée de me créditer, était même tout entier motivé par le besoin de « payer ma dette à cette patrie d’accueil ».</p>
<p>Il y a dans cette rage idéologique quelque chose d’aveugle, de forcené et de profondément inique. Imagine-t-on un journal suisse traiter d’« arabe » l’hypothétique conseiller d’origine maghrébine d’un ministre socialiste ? Pourquoi fallait-il relever mon origine — erronée du reste, puisque l’État où je suis né s’appelait Yougoslavie et que je suis à moitié croate par le sang (détails que Mme Parvex dans sa fièvre n’a pas eu le temps de méditer) ? Pourquoi, justement, faut-il faire mention des liens de sang dans l’entourage d’un Freysinger alors qu’on se l’interdit dans tous les autres cas ? Parce que dans les années 1990, en tant que Suisse, j’ai été un empêcheur d’affabuler en rond sur le conflit qui avait détruit mon pays natal ? Ou parce que tous les moyens sont bons pour compromettre le conseiller d’État, l’isoler professionnellement et entraver son action ?</p>
<p>Ils utilisent un organe d’information comme une arme de combat et se désolent ensuite de sa perte d’influence. <em>De quoi, en fin de compte, ces gens ont-ils tellement peur ?</em></p>
<p>Je ne suis pas encore chargé de communication du Conseiller d’État Freysinger et mes partis pris, pour le moment, ne concernent que moi. Mais il sera difficile, pour le naturalisé que je suis, d’entretenir la communication avec un journal qui pratique dans ce pays la discrimination ethnique.</p>
<p>Slobodan Despot, le 27 août 2013.</p>
<h3>Sources:</h3>
<blockquote>
<p><a href="http://tinyurl.com/ke8vocr">L'article du « Temps » de ce jour.</a></p>
<p><a href="http://tinyurl.com/k2hartv">Ma tribune sur le général Mladić dans le "Temps" du 1er juin 2011.</a></p>
<p><a href="http://despot.ch/blog/index.php?id=8886757212833164387">Le chapitre 1 (« ludique »).</a></p>
</blockquote>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-88867572128331643872013-08-27T10:46:00.001+02:002013-08-27T10:48:43.100+02:00A quoi le "Temps" passe son temps (chap. 1: la partie ludique)<p><img src="http://note.io/17admzy" alt="Despot-LeTemps-130827" /></p>
<p><!--?xml version="1.0" encoding="UTF-8" standalone="no"?--> <em style="font-family: Arial;"><strong>1. Pourquoi "Le Temps" souligne-t-il l'origine ethnique — incomplète — du porte-parole d'Oskar Freysinger?</strong></em></p>
<div style="font-family: Arial;">a) Pour saluer l'ouverture du ministre UDC aux jeunes issus de l'immigration.</div>
<div style="font-family: Arial;">b) Pour mettre en garde contre l'invasion étrangère.</div>
<div style="font-family: Arial;">c) Serbe = Srebrenica = génocide = pas sympa.</div>
<div style="font-family: Arial;"> </div>
<div style="font-family: Arial;"> </div>
<div style="font-family: Arial;"><em><strong>2. Pourquoi "Le Temps" parle-t-il de Srebrenica en traitant de l'actualité valaisanne?</strong></em></div>
<div style="font-family: Arial;"> </div>
<div style="font-family: Arial;">a) Par devoir de malveillance.</div>
<div style="font-family: Arial;">b) Par devoir de mémoire.</div>
<div style="font-family: Arial;">c) Pour se faire de la pub (les propos de l'intéressé sur cette question ayant paru justement dans "Le Temps" en juin 2011).</div>
<div style="font-family: Arial;"> </div>
<div style="font-family: Arial;"> </div>
<div style="font-family: Arial;"><em><strong>3. "Le Temps" est un journal</strong></em></div>
<div style="font-family: Arial;"><em><strong><br /></strong></em></div>
<div style="font-family: Arial;">a) De droite.</div>
<div style="font-family: Arial;">b) De gauche.</div>
<div style="font-family: Arial;">c) Sans importance.</div>
<div style="font-family: Arial;"> </div>
<div style="font-family: Arial;"> </div>
<div style="font-family: Arial;"><em><strong>4. Avec un tel style d'information, "Le Temps" est</strong></em></div>
<div style="font-family: Arial;"> </div>
<div style="font-family: Arial;">a) Un bureau de police.</div>
<div style="font-family: Arial;">b) Un journal de référence.</div>
<div style="font-family: Arial;">c) Du passé. </div>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-86726436484522183332013-08-26T01:45:00.001+02:002013-08-26T01:45:45.947+02:00Le seul événement spirituel du XXIe siècle<p>Le titre de l’édition française ne dit pas grand-chose. <em><a href="http://www.editions-syrtes.fr/fr/02-Catalogue/Titres/154-Pere-Rafail-et-autres-saints-de-tous-les-jours/">Père Rafaïl et autres saints de tous les jours</a>.</em> Un petit côté douceâtre-cul-bénit qui pourrait refroidir les éventuels lecteurs de moins de 70 ans. Le titre original est bien plus claquant, et même taoïste dans son paradoxe: <em>Несвятые святые</em>, “Saints non-saints et autres histoires”. L’auteur en est un moine qui eût été cinéaste si la Providence ne s’en était mêlée. Il est, murmure-t-on, le confesseur de Poutine. Son livre est la meilleure vente en Russie depuis 2012. Vous imaginez un recueil de vies de saints — fussent-ils <em>non-saints</em> — trôner en tête de gondole à la FNAC?</p>
<p>Non. C’est tout simplement impensable. C’est pourquoi l’on n’y pense pas. Même quand on en rêverait.</p>
<p>C’est à ces lecteurs-là que je m’adresse. A ceux qui ont relégué la foi chrétienne au rang des sectes et des superstitions, je recommande la <em>Philosophie du vin</em> de Béla Hamvas, qui est un “livre de prières pour les athées” d’une phénoménale insolence. S’ils arrivent à endurer les sarcasmes du Hongrois à l’égard de leur “mauvaise religion”, la “pire” qui soit — l’athéisme —, alors bon. Nous ne sommes vraiment pas de la même planète. Avons-nous même des organes sensoriels semblables?</p>
<img src="http://note.io/141IGdP" alt="Couverture Père Rafaïl" />
<p>Pour ceux qui se réveillent chaque matin, comme moi, sur une planète bleue baignée dans la lumière divine — et quel que soit le nom qu’ils donneront à cette lumière — le livre de Tikhon est un compagnon providentiel, inespéré. Il parle directement aux cœurs. Il se passe de toute doctrine. Tout n’est qu’exemple, que réalité et que vie vécue. Seule la transcendance — selon Hamvas encore — nous permet d’appréhender le réel dans toute la saveur de sa présence matérielle et c’est pourquoi ce recueil de témoignages et de portraits empreint d’une foi profonde est sublimement succulent. Même les heures de corvées monotones et de prières répétitives y ont un goût unique et… divin. Sans parler des personnages. Des destinées prodigieuses, tragiques, que cachent ces barbes blanches et ces bures. Des persécutions sans nom que ces martyrs ont endurées avec une humeur égale et plutôt bonne. Des négociations permanentes, et parfois drolatiques, que ces prieurs ont dû mener, des décennies durant, avec les émissaires rouges du Diable en personne. Du refus absolu de juger qui que ce soit. De l’amoralité de la grâce. Des pannes de voiture providentielles. Des policiers miraculés. Des mille et un secrets de survie dans un Etat déchaîné contre sa propre population et sa foi…</p>
<p>Le livre de Tikhon nous rapproche de la sainteté et de l’enchantement du monde comme par un coup de zoom ultrapuissant. C’est instantané. Jubilatoire. Sans réplique. Et nous nous rappelons soudain qu’il est possible, et même bon, d’être bon. D’être simple. D’être humble et patient. Qu’aucune puissance de ce monde ne peut briser l’agneau. Il ne parle pas comme un bréviaire, ni comme un calendrier de saints. Il parle comme un jeune Russe, soviétique et cinéphile qu’il a été et qu’il est encore, malgré les années. Il ne parle pas à des vieilles chaussettes, il nous parle à nous, croyants ou non, russes ou non, saints ou non saints. La seule différence d’avec un profane, c’est que Tikhon a vu d’où venait la lumière, et qu’il ne s’en est jamais rassasié. Et qu’il sait nous faire comprendre qu’être nostalgique de la sainteté, c’est déjà être saint. Et qu’il communique sa joie comme aucun auteur n’a su le faire depuis longtemps.</p>
<p>Les éditeurs et les traducteurs de ce livre unique se verront déchargés de bien des hypothèques à l’heure dernière. Je m’afflige de n’être ni des uns ni des autres. Aussi j’ai bon espoir que M. de Pahlen, le patron des Syrtes qui nous offre ce joyau, ne m’en voudra pas de retraduire ici un passage:</p>
<h2>A propos d’une sainte confrérie (histoire qui pourrait figurer dans un futur Prologue)</h2>
<blockquote>
<p>Il existait, à la veille de la Révolution, quelque part au fin fond de la Russie, un monastère dont on disait que les moines n’étaient qu’un ramassis de flemmards et d’ivrognes. Pendant la geurre civile, les bolchéviques firent irruption dans la bourgade voisine. Ils rassemblèrent la population sur la place du marché, et alignèrent également les moines sur un rang.</p>
<p>Le commissaire s’adressa alors à la population, en montrant les soutanes noires:</p>
<p>— Citoyens! Habitants de cette ville! Vous connaissez tous mieux que moi ces ivrognes, ces gloutons et ces feignants! Leur règne touche à sa fin. Mais pour que vous puissiez bien comprendre comment ces tire-au-flanc ont berné des siècles durant le peuple des travailleurs, nous allons déposer ici, sur ce sol devant eux, leurs croix et leurs évangiles. Et à présent, sous vos yeux, chacun d’eux va piétiner ces instruments de tromperie et d’asservissement populaire. Puis nous les laisserons s’égailler où bon leur semble.</p>
<p>Il y eut quelques rires dans la foule.</p>
<p>Mais alors, voici que sous les cris et les quolibets, s’avance l’higoumène (père supérieur), un homme costaud au visage large et creusé et au nez rouge, qui parla ainsi à ses moines:</p>
<p>— Eh bien voilà, mes frères, nous avons vécu comme des cochons, mourons au moins comme des chrétiens.</p>
<p>Dès lors, aucun des moines ne broncha. Ils furent tous décapités au sabre le jour même.</p>
</blockquote>
<p>Heureux les peuples qui lisent davantage Tikhon que Dan Brown! Pesez sur les statistiques françaises: commandez-là à votre libraire en toute urgence, non seulement pour votre salut, mais encore pour votre joie (c’est un peu la même chose). </p>
<p>PS <a href="https://www.evernote.com/shard/s1/sh/b9b8ff6e-c14e-46a6-acf5-772106d6a360/583e6a42162b519c0015f0aa4e22cf1e">A lire</a>, en guise d’avant-goût, l’entretien que l’archimandrite Tikhon a accordé à Antoine Colonna et Jacques de Guillebon.</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-37547596757212633652013-08-23T08:26:00.001+02:002013-08-23T08:26:00.193+02:00Le pain des robots… ou le fleuve des enfersC’est un hangar colossal, avec des rayons numérotés s’étendant à l’infini. Les ouvriers qui y travaillent, les *pickers*, ressemblent à des petits robots. De fait, pour le moment, ils mangent le pain des robots. La direction a sans doute envisagé une automation complète, mais jugé l’investissement trop lourd en l’état actuel de la technologie.
En l’état actuel, donc, ce sont des humains qui servent de bras à l’ordinateur central, qui les pilote grâce à un lecteur de codes-barres affecté à chaque picker à son arrivée et qui ne le quittera plus durant huit heures. Précédé d’un grand chariot, l’ouvrier suivra dès lors aveuglément les ordres de son terminal, d’une allée à l’autre, en quête de marchandises à expédier. Ses trajets sont optimisés par l’ordinateur, mais il parcourra quand même 40 kilomètres avant de pouvoir raccrocher. Rentré chez lui, harassé, il tombera dans un sommeil lourd hanté par des rêves absurdes, des séquences aléatoires d’objets plongeant dans un gouffre sans fond: un roman de Proust suivi d’un toaster, suivi d’un t-shirt, suivi d’une ampoule, suivie d’un DVD, suivi d’un fauteuil, suivi d’un manuel de taï-chi, suivi de guirlandes de Noël… Sa dernière tranche de huit heures — celle du loisir —, il la passera à manger sans faim et à zapper sans but sur sa télévision. Il n’aura pas la force de faire autre chose. Et si cette vie ne lui convient pas, il ne lui restera qu’à retourner dans les limbes du chômage ou à se taire: il est tenu au silence, même envers ses proches, par un contrat de confidentialité digne de l’industrie militaire.
Mais il tiendra bon. Son employeur est une multinationale charismatique qui enseigne et fait répéter à tous ses sujets, du cadre au manœuvre, le même mantra: *«Work Hard. Have fun. Make History.»* Travaillons dur! Amusons-nous! Construisons l’histoire!
Ceci n’est pas une suite des *Temps modernes* de Chaplin ni le scénario perdu du *Métropolis* de Fritz Lang, version noire. Ce n’est pas non plus une extrapolation sur ce que serait devenue l’URSS à l’ère de la micro-informatique. C’est la réalité du travail chez Amazon, le plus grand libraire de la planète, tel que décrit de l’intérieur par un journaliste «infiltré dans le meilleur des mondes».
![En Amazonie. Infiltré dans le meilleur des mondes](http://note.io/12uILJd)
Le livre, pour ce mastodonte, n’aura été que l’alibi d’un coup de force sur la distribution. Un coup de force généreusement subventionnée par les gouvernements, fiers de clamer qu’ils ont ainsi créé cent emplois pour en tuer deux mille. Car il en coûte à Amazon, pour vendre un livre, dix-huit fois moins cher qu’à une librairie ordinaire…
Nous nous croyions en route pour un monde meilleur grâce à l’internet, nous voici relégués à la première révolution industrielle. C’est Manchester en 1800 aggravé de non-sens postmoderne. «Ce temps est seulement celui de l’hébétude et de l’inconsistance», confesse Jean-Baptiste Malet. Son livre, *En Amazonie* (éd. Fayard), est un témoignage d’éveil sur notre temps. Il nous montre où se situe le fascisme, le vrai, celui qui nous concerne, à l’heure où tout le système nous invite à regarder ailleurs.
![Chronique Nouvelliste 130823](http://note.io/12uIB4A)Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-48338686836379796542013-07-31T10:48:00.001+02:002013-07-31T10:48:48.474+02:00Franz Weber: mon engagement pour la Serbie<p><em>Franz Weber est, avec Roger Federer, le plus illustre des Suisses. Outre ses nombreuses campagnes pour l'environnement et la protection des animaux, il s'engage également, avec sa fondation, pour la défense des trésors culturels de l'humanité menacés par l'industrialisation. Ayant défendu avec succès les Baux-de-Provence ou le sanctuaire de Delphes, il milite depuis des décennies pour le classement des monastères serbes du Kosovo dans la liste du patrimoine mondial gérée par l'UNESCO.</em></p>
<p><em>Pour cette raison, Le 29 juillet dernier à Berne, le grand écologiste suisse recevait des mains de l'ambassadeur de Serbie, M. Milan St. Protić, la Médaille d'argent du mérite qui lui a été décernée par le président de Serbie pour son engagement en faveur de la préservation de l'héritage architectural et spirituel de la Serbie. Voici l'allocution, remarquable, qu'il a tenue à cette occasion.</em></p>
<h2>MON ENGAGEMENT POUR LA SERBIE</h2>
<p>Je me sens particulièrement honoré et ému par la distinction qui m’est décernée aujourd’hui par M. Tomislav Nikolić, le président de la République de Serbie. Depuis que je me bats pour la sauvegarde de l’héritage culturel et spirituel de ce pays, il m’a parfois semblé que c’était, de tous mes combats, le moins bien compris et le plus mal accueilli. Mais je mesure toujours l’importance de mes causes à l’intensité des oppositions qu’elles soulèvent. Selon ce critère, la cause serbe est une cause cruciale.</p>
<p>Tout avait commencé voici plus de trente ans, lorsque mon ami Komnen Bećirović, de Paris, avait attiré mon attention sur le sort de deux monastères de l’Église orthodoxe serbe menacés par l’industrialisation : celui de Morača, au Monténégro, et celui de Studenica en Serbie. Je savais déjà que c’étaient des hauts lieux de l’histoire serbe et des joyaux de l’art médiéval. Lorsque je me suis rendu sur place, j’ai également compris et ressenti le rayonnement spirituel de ces lieux. En pénétrant dans l’enceinte de Studenica, j’ai eu l’impression d’avoir découvert l’un des portails qui mènent au ciel. Il n’y a pas besoin d’être moine orthodoxe pour le croire, pas même besoin de croire en Dieu. Il m’était d’autant plus incompréhensible que des gens puissent envisager de noyer ces foyers de civilisation sous l’eau d’un barrage.</p>
<p>Plus tard, en 1999, c’est une menace encore plus grande que nous eûmes à affronter, avec les 78 jours de bombardements qu’a subis la Serbie de la part de l’OTAN. Je perdais le sommeil en pensant à cette barbarie qui se prolongeait.</p>
<p>On se demande parfois d’où me viennent cette ferveur et cet attachement à un pays étranger. Se l’est-on demandé lorsque je suis allé arracher le sanctuaire de Delphes aux mains des bétonneurs et des pétroliers ? L’enjeu, ici, est très semblable : la civilisation et l’art sacrifiés à de basses opérations géopolitiques.</p>
<p>Mais ce n’est pas tout. Je suis, on le sait, un grand patriote, un amoureux fou de la Suisse. Or il existe des similitudes mystérieuses entre mon pays et la Serbie. Une passion semblable pour l’indépendance et la souveraineté à tout prix. Des ennemis historiques communs : la maison des Habsbourg. Des montagnes sauvages et spectaculaires habitées par un peuple dur à cuire. Une culture ancestrale de la milice et de la population armée. Et puis, surtout, cette situation d’écharde dans le pied des grandes puissances, qui nous vaut, aux Suisses comme aux Serbes, des campagnes de dénigrement et d’intimidation périodiques.</p>
<p>Être suisse, comme être serbe, est un honneur et un destin. Je suis fier, aujourd’hui, d’être reconnu et aimé par ces deux nations infiniment plus grandes par le rôle qu’elles jouent que par leur force démographique ou par leur étendue.</p>
<p>Franz Weber</p>
<p><img title="" src="http://tinyurl.com/nka4xxf" alt="Franz Weber avec Milan St. Protić" /></p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-12003405874609215452013-07-28T17:44:00.001+02:002013-07-28T17:44:44.536+02:00H. H.<p>Le creux de l’été me ramène parfois à ces vies antérieures où je pouvais passer des journées entières à bouquiner à l’ombre d’un acacia, bercé par l’infime zézaiement des insectes et ne levant les yeux que pour suivre la migration des rayons de soleil sur l’herbe, qui me tenait lieu d’horloge. J’ai lu ainsi, avec des tartines et des pommes, les classiques que seul l’adulte peut comprendre, mais que seul l’adolescent a le temps de lire. Ce décalage tragique nous fait confondre, parfois, la « grande » littérature avec le Machu Picchu ou le temple d’Angkor, des monuments sublimes mais dont l’ordre et les symboles paraissent sans rapport aucun avec notre vie. Ah, si jeunesse savait…</p>
<p>Or voici que l’été de mes 46 ans, je tombe sur un livre allemand au titre irrésistible, que l’on pourrait traduire par : « La magie intérieure des commencements. Récit de la vie d’Hermann Hesse. » Hesse : l’un des classiques de notre adolescence, qui nous attirait plutôt par l’aura de mysticisme oriental qui l’entourait que par la matière réelle de ses livres, jalons d’une existence déchirée et si riche d’enseignements. La biographie que lui consacre Alois Prinz nous dépeint un enfant inadapté et malheureux — un « HP », dirait-on aujourd’hui — ricochant entre une famille aimante mais bigote jusqu’à la bêtise et cette éducation disciplinaire, inhumaine, qui préparait des générations d’Européens à se faire massacrer sans but et sans objection dans les charniers de 1914. Tentatives de suicide. Fugues. Poèmes naïfs à compte d’auteur. Et puis, soudain, quelques récits qui touchent une fibre encore jamais titillée…</p>
<p><img title="" src="http://tinyurl.com/ocfuoq5" alt="Hesse dans les Alpes" /></p>
<p>Ses détracteurs ont accusé le prix Nobel allemand d’avoir rhabillé ses complexes de jeunesse en rêveries littéraires assaisonnées d’analyse jungienne. Ce n’est pas faux. Mais l’objection pourrait s’étendre à la plupart des auteurs. Le miel des artistes n’est qu’un distillat de leurs poisons intérieurs. Encore faut-il savoir distiller.</p>
<p>Nietzsche vient de dévaster la civilisation puritaine, Freud et Jung carottent l’âme humaine comme un sous-sol, l’Allemagne païenne et industrielle déborde de son berceau chrétien et rural, bête enivrée par sa propre force qu’un caporal autrichien va faire danser comme un ours de foire. Hesse canalise dans sa vie les énergies titanesques et opposées de son temps. La « voie médiane » de sa quête ne peut être qu’une moyenne mathématique entre deux extrêmes, la voie de l’ange et celle du démon. L’être entier que veut la morale civique et religieuse est périmé, et l’être nouveau, complexe et déchiré, n’a pas encore trouvé sa définition. A ses nombreux admirateurs, il ne donnera qu’un conseil : écoute-toi toi-même. Le disciple, selon lui, est un être inachevé par définition.</p>
<p>En un mot, l’auteur de <em>Siddhartha</em> et de <em>Narcisse et Goldmund</em> était un observateur aigu et crucial du siècle le plus douloureux de notre histoire. Il nous rappelle que la littérature est, à ce jour, la forme la plus riche et la plus fidèle du témoignage humain. En la négligeant, nous négligeons notre humanité elle-même.</p>
<p><em>Le Nouvelliste</em>, 26 juillet 2013.</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-35993934610126782022013-07-12T08:04:00.001+02:002013-07-12T08:06:03.007+02:00Une lecture de plage<p>Lorsqu’il mourut en 2003 à l’âge de cinquante ans, le romancier chilien Roberto Bolaño laissait derrière lui un immense chef-d’œuvre inachevé, en cinq parties, mystérieusement intitulé <em>2666</em>. Avec ses 1376 pages, l’édition de poche ressemble à une brique. A cause de son contenu foisonnant, litanique et irrésumable, mais aussi de ses dimensions appropriées, je le lis à la piscine. La troisième partie, intitulée « Partie des crimes », se résume à chroniquer la découverte, aux abords de la ville de Santa Teresa au Mexique, de dizaines de cadavres de jeunes femmes violées et torturées. Cette agglomération de bars louches et de manufactures miséreuses au bord du désert de Sonora ressemble fortement à Ciudad Juárez, cité ravagée par la guerre des gangs et où des centaines de femmes ont vraiment été assassinées, impunément, depuis les années 1990. Lorsque la procession des horreurs m’hypnotise avec ses répétitions amples et obsessionnelles rappelant une Passion de Bach, je glisse le pavé sous ma nuque, me tourne vers le ciel et ferme les paupières pour laisser le soleil m’inonder les yeux comme un halo rouge.</p>
<p>J’entends d’ici les rombières qui s’éventent avec <em>Marie-Claire</em> : « Quelle idée pour une lecture de plage !» Mais l’art a cet avantage sur le toc qu’il transfigure la réalité la plus sordide et nous ouvre l’âme à des horizons inattendus. Qui reprocherait à Baudelaire d’avoir chanté une charogne dans ses <em>Fleurs du Mal</em>, ou à Lynch d’entamer son film culte <em>Blue Velvet</em> par un gros plan sur une oreille coupée ? Bolaño consacra ses dernières énergies de cancéreux à ce livre-cathédrale, ce livre-catacombe, ce réseau de destins et de correspondances entortillé comme un système neuronal. Son univers en apparence absurde respire et pense par lui-même et nous fait penser quand nous nous y abandonnons.</p>
<p><img title="" src="http://tinyurl.com/q6dh8aw" alt="2666-folio" /></p>
<p>D’où le pavé sous la nuque, le halo rouge et la rêverie fertile qu’ils initient. Pourquoi l’auteur nous décrit-il avec tant de minutie ces personnages sans intérêt de flics suants et dépassés ? De journalistes curieux mais velléitaires ? De magistrats cyniques et d’universitaires superflus ? Parce qu’ils nous sont familiers, d’autant plus familiers qu’ils sont inconsistants, parce qu’ils ne composent pas une lointaine province mais le monde où nous vivons. Parce que ces êtres-fonctions, ces êtres de paille sont totalement démunis et anesthésiés face au mal. Au mal qui, lui, rejaillit avec une réalité aiguë et choquante. Les seuls vrais personnages, dans ce livre, sont les criminels. Le crime est toujours égal à lui-même, mais il n’y a plus de justiciers pour le contenir. Même plus un citoyen pourvu de courage, armé d’une once d’esprit de sacrifice. Le crime est seul sur le ring.</p>
<p>J’ouvre alors les yeux et je regarde autour de moi. Violations de la vie privée, manipulations, irresponsabilité, impunité, complaisance, hypocrisie. Nous sommes tétanisés par notre propre effondrement. La veulerie est identique, moins les cadavres de pucelles, mais ce n’est qu’une question de temps. Il n’est pas loin, le désert de Sonora : il est en nous.</p>
<p><em>Le Nouvelliste</em>, 12 juillet 2013.</p>
<p><img title="" src="http://tinyurl.com/o43o2vo" alt="Article_NF" /></p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-54408897035432556012013-06-28T08:53:00.001+02:002013-06-28T08:53:04.037+02:00Le chien fou<p>A l’heure où j’écris ceci, on ne sait toujours rien du sort de la « balance » qui a divulgué l’ampleur de l’espionnage électronique institué par les agences de sécurité américaines. Edward Snowden se trouverait encore à l’aéroport de Moscou. Il devrait, comme Julian Assange, trouver refuge en Équateur, petit pays d’Amérique latine soudain devenu havre des maquisards numériques. La Russie, sans lui accorder l’asile, a toutefois exclu de l’extrader aux États-Unis, où l’on ne badine pas avec l’accusation d’espionnage. Le soldat Bradley Manning en sait quelque chose, lui qui risque perpète pour avoir révélé <em>via</em> Wikileaks des crimes de guerre US particulièrement hideux. Lui qui, loin d’être distingué pour sa bravoure et son humanisme, fait l’objet depuis son arrestation d’un « traitement cruel, inhumain et dégradant ». Ces mots sont de l’ONU…</p>
<p>Les mêmes mots, voire pires, s’appliquent au traitement des détenus du camp de Guantanamo, que le premier président noir, cool, tweeteur et accessoirement prix Nobel de la Paix ne songe plus du tout à fermer. A voir les vocations de kamikazes que le seul nom de cet enfer suscite dans le monde musulman, on pourrait penser que les États-Unis n’entendent pas éradiquer le terrorisme, mais au contraire le faire fleurir.</p>
<p>Vous souvenez-vous de Bobby Fisher, le plus grand joueur d’échecs de tous les temps ? Je l’ai croisé, dans les années 90, en Yougoslavie. Il y avait rejoué son match historique contre Boris Spassky, au mépris de l’embargo total institué contre ce pays par la « communauté internationale » (lisez : les USA et leur cour). Depuis, ce génie était traqué dans le monde entier pour une partie d’échecs et quelques délits d’opinion. Caché au Japon, malade, il finit par obtenir l’asile en Islande, où il parvint juste à temps pour y mourir en paix. Hors de l’île aux geysers, le monde démocratique et « libre » n’avait pas fait un geste pour lui.</p>
<p>Avec Ben Laden, on a fait encore mieux : presque dix ans après sa mort probable — il était sous dialyse en septembre 2001 ! — le voici qui ressuscite au Pakistan pour se faire abattre et jeter à la mer, sans même une photo, par des commandos US. Trois mois plus tard, le même <em>SEAL Team 6</em> était descendu dans son hélico au-dessus de l'Afghanistan. Trente soldats d’élite morts d’un coup, et presque rien dans les médias ! Dommage. Pour toute preuve de la capture du Fantômas enturbanné, il nous reste le film de Kathryn Bigelow <em>Zero Dark Thirty</em>, un brillant divertissement qui a bien mérité son Oscar. Les scripts de Hollywood nous tiendront bientôt lieu de manuels d’histoire.</p>
<p><img title="" src="https://www.evernote.com/shard/s1/sh/dd6755a4-e274-4988-b0aa-c000f27e4fd4/8fcf9c913d8de2e54158f4d1b121c306/deep/0/maddog.png" alt="Mad Dog" /></p>
<p>Le gendarme global se comporte comme un chien fou. Il torture, viole, rançonne, bombarde, assassine. Il arme en Syrie les mêmes terroristes d’Al Qaida qu’il prétend traquer ailleurs. Il nous sert des montages pour débiles mentaux que nos autorités et nos médias répercutent par couardise, dénonçant avec zèle les sceptiques. A quel moment la bienséance se mue-t-elle en complicité ? Voilà un bon sujet pour les futurs historiens de la collaboration…</p>
<p><em>Le Nouvelliste</em>, 28 juin 2013.</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-25906103557314032602013-06-14T09:46:00.001+02:002013-06-14T09:46:27.312+02:00Enterrez-moi ça (Alpiq ou le Valais)!<p>Après la mise en œuvre de la Loi sur l'aménagement du territoire (LAT) et de la Lex Weber, et peut-être la confiscation prochaine par Berne des retours de concessions sur les barrages, le Valais ressemblera enfin à l'idylle alpine que les bobos de la Suisse urbaine veulent faire de lui. Une vallée heureuse, figée dans son état cadastral de 2012, à la population raréfiée par l'émigration économique, et dont les indigènes restants, rhabillés en coutins, petits chapeaux et velours noir, vivront confortablement des revenus du tourisme.</p>
<p>Confortablement? Pas tout à fait. Pour leur confort, la Confédération a prévu autre chose. Le Tribunal fédéral vient d'autoriser la construction de la ligne à très haute tension aérienne d'Alpiq entre Chamoson et Mörel. Nous allons donc avoir droit, dans la région la plus peuplée du canton, à un étendage de 50 km de long, posé sur des pylônes de 96 m de haut, sur lequel nos lavandières aux bras musclés pourront étendre nos camisoles de chanvre.</p>
<p><img title="" src="https://www.evernote.com/shard/s1/sh/2a6fa9e9-a451-48e0-b307-7280ab429965/c539459902e10aae2a1e8b98957bc566/deep/0/Pylone.png" alt="Pylone électrique" /></p>
<p>Ce sera en effet la seule utilité envisageable sur le plan local du projet mastodonte d'Alpiq, dont la seule fonction est de faciliter le commerce de l'électricité entre la France et l'Italie. Si cette autoroute électrique privée doit passer par le Valais, ce n'est pas pour le bien de ses habitants, mais parce qu'elle ne peut passer ailleurs. Le Conseil d'Etat français — autorité administrative et non politique — a en effet fait barrage à un autre tracé pour la même ligne, via Nice, qui eût défiguré les gorges du Verdon. La Suisse, qui n'a plus rien à refuser aux cartels, a bien voulu leur sacrifier la vallée du Rhône.</p>
<p>Ainsi donc, la même instance qui vient de mettre sous verre le paysage valaisan par une application stricte de la Lex Weber, vient en même temps de permettre sa pollution définitive par un projet privé colossal sans aucun intérêt pour sa population, mais à l'impact insondable sur son tourisme et son bien-être. Ces lignes à haute tension, on le voit dans le Chablais, suffisent seules à altérer le caractère d'un paysage: de naturel, il devient industriel, à perte de vue. Qui viendra se "ressourcer" à l'ombre de cette ferraille?</p>
<p>L'enterrement des lignes, réclamé de longue date par la population et les instances législatives et exécutives valaisannes? Enterré! Certes, le Tribunal fédéral attendait une proposition dans ce sens, mais comme elle n'est pas venue — parce que trop chère — il n'a pas insisté. Le projet "pilote" d'enfouissement promis par l’exploitant n’aura été qu'un leurre pour les gogos. Citoyens, adoptez la même logique: faites traîner votre déclaration fiscale et vous ne paierez plus d'impôts!</p>
<p>Ah, si, un tracé sous terre semble prévu, dans la déserte forêt de Finges. Pour la paix visuelle des écureuils. Le sens esthétique et la santé des humains? On s'en fout! Blague à part: cette décision criminelle, incohérente et méprisante doit au moins avoir une vertu: celle d'unir les Valaisans dans un refus unanime dont leur nouveau gouvernement sera le porte-parole. S'il ne sert pas à nous protéger de tels abus, à quoi sert-il?</p>
<p><em>Le Nouvelliste</em>, 14 juin 2013.</p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-23977246572642370652013-06-10T09:25:00.001+02:002013-06-10T09:25:58.334+02:0050 minutes de libre entretien à la télé!<p>Lorsque les télévisions officielles vous comptent les secondes d'expression en vous recommandant de ne surtout rien dire d'essentiel, les médias internet explosent.</p>
<p>La webtélévision (française) <a href="http://www.prorussia.tv/">Prorussia.TV</a>, en quelques mois d'existence, a atteint les 1'500.000 visites par semaine. Débordant de sa mission initiale, elle se veut désormais un "anti-TF1", contrepoids de la désinformation ambiante.</p>
<p>Elle m'a permis de m'exprimer à bâtons rompus sur toute une série de sujets: le débat d'idées, la Suisse, l'éducation, l'UE et la Russie etc.</p>
<p><a href="http://www.prorussia.tv/Slobodan-Despot-fondateur-des-Editions-Xenia_v345.html">Voir l'entretien.</a></p>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7480808146022573789.post-85264627614547153322013-06-04T21:48:00.001+02:002013-06-05T09:19:50.589+02:00Jean Romain, penseur du Tao<blockquote>
<p><em>« La rébellion des nouvelles idéologies contre le Tao est une rébellion des branches contre l’arbre: si les rebelles parvenaient à vaincre, ils s’apercevraient qu’ils se sont détruits eux-mêmes. »</em> (C. S. Lewis, <em>L'abolition de l'homme</em>, chap. II « The Way »)</p>
</blockquote><br />
<p><strong>Jean Romain est le philosophe de l’éducation le plus connu et le plus lu de Suisse Romande.</strong> Son essai <em>La Dérive émotionnelle</em> (L’Age d’Homme, 1998) a introduit un concept-clef dans le langage commun: à savoir que l’homme moderne — surtout à l’échelle collective — se laissait trop facilement obnubiler par l’émotion tandis que le jugement rationnel était dénigré et négligé; et que cette dérive n’était pas occasionnelle ni fortuite, mais bien voulue et orchestrée par le système éducatif, moral et médiatique en place.</p><br />
<p><img title="" src="https://www.evernote.com/shard/s1/sh/d5956071-03c1-4c24-9013-f30ff16af75b/1ade8f0e45eb2d6fa22315a4bf03a968/res/39c6757b-eb06-468c-ad5a-f690c1c8cc2b/skitch.png" alt="Jean Romain par Slobodan Despot, 2006" /></p><br />
<p><strong>Un être guidé par ses impulsions émotives et amputé de sa raison est manipulable et nécessairement manipulé</strong>, estimait Jean Romain. Pour cette raison, ce professeur respecté s’est toujours opposé aux doctrines pédagogiques-pédagogistes du temps, prétendant placer l’élève, et non le savoir, au centre du projet scolaire, prétendant éduquer plutôt qu’instruire. Trente-sept années durant, à Genève, il a mené sa barque comme il l’entendait: non comme il lui plaisait, mais comme on l’a toujours pratiqué, et comme on le pratique encore dans les sciences et les arts que l’idéologie n’a pas encore brouillés. Cela lui a valu la haine des pédagogos en place et une solide réputation de réac. Il n’en eut jamais cure.</p><br />
<p><strong>Aujourd’hui, Jean Romain a jeté l’éponge.</strong> En quittant prématurément le professorat, il a pris la peine de livrer publiquement ses raisons, sans détours ni langue de bois. L’acte est à saluer dans cette Suisse où il est mal venu de faire des vagues. « L’école manque de vie », dit-il et cette phrase résume tout. Il parle bien entendu de l'école qu'il a pratiquée, à Genève, qui est à la fois l'un des systèmes les plus "avancés" et les moins performants de Suisse. Elle est, d'une certaine manière, le laboratoire de pointe d'une tendance omniprésente, portée par les réseaux académiques et les organisations internationales, et définie par des postulats philosophiques et anthropologiques étroits. Un lit de Procuste global ne tenant compte ni des héritages spirituels ni des traditions locales. Ni, et c'est peut-être le plus grave, des aspirations réelles de l'être humain tel qu'il est, remplacées par une vision volontariste de l'humanité telle qu'elle <em>devrait être</em>, projet en chantier permanent dont les pédagogues sont les interprètes et les ingénieurs. Oui, pour Jean Romain, l’école manque de vie car elle est, par ses exigences nulles et le rôle d’animatrice-éducatrice qu’elle s’est donné, une antichambre de l’ennui et de la standardisation de l’humain, donc de la mort. Comme JR le rappelle sans cesse, on le lui demandait pas d'éduquer — laissons cela à la famille, tant qu'elle existe — mais d'abord d'instruire.</p><br />
<p><strong>« We don’t need no education »</strong>, chantait Pink Floyd dans « The Wall ». Il vaut la peine d’écouter ces textes, souvent profonds, foudroyants et prophétiques. Nous n’avons pas besoin d’éducation, crie cet hymne des années 80, et il ajoute aussitôt: Nous n’avons pas besoin de contrôle de pensée (« We don’t need no thought control »). Nous ne voulons pas — et c’est le message clef de cet album-univers orwellien, monument de la culture du XXe siècle — nous ne voulons pas « n’être que des briques dans le Mur ». Pink Floyd avait compris, à la suite d’Orwell, de Soljénitsyne, de Zamiatine et de tous les témoins et penseurs de l’ère totalitaire, que l’« éducation » des masses n’était qu’une chaîne de dressage pavée de belles intentions, mais dont le résultat ultime n’était plus qu’une ombre d’humain, créature pavlovienne guidée par ses désirs et ses peurs, habitée d’un vide que le Pouvoir comble, au choix, par des élans grégaires et vindicatifs — comme dans le nazi-communisme — ou par des boulimies de consommation et de jouissance incontrôlées — comme dans l’utopie libérale-libertaire où nous vivons. Tout, sauf l’être « autonome et conscient de soi » que la tradition occidentale, creuset de l’idée même de liberté avait, depuis Sophocle, posé comme modèle de l’humain.</p><br />
<p><strong>Le combat de Jean Romain n’a rien de ringard</strong> — à moins qu’on taxe de ringards les esprits les plus lucides du XXe siècle. Ce n’est pas du « comme avant » qu’il réclame, mais du « comme il faut ». Ce n’est pas telle ou telle doctrine sociale ou religieuse qui l’anime, mais le sentiment inné, et universellement partagé quoi qu’en disent les idéologues, du juste et du bon. Faire entrer dans la filière scolaire des enfants vifs et curieux pour en voir sortir des idiots semi-analphabètes, cela ne peut être appelé un succès, sauf si l’idiotie généralisée est l’objectif du projet.</p><br />
<p><strong>Aux velléités d’intrusion du Pouvoir dans nos vies,</strong> justifiées par la pensée scientiste et facilitées par ses inventions, Jean Romain a opposé la relation essentiellement humaine et personnelle du maître et de l’élève. Au dressage (fût-il « copain »), il a opposé l’instruction, à la pédagogie de laboratoire le bon sens et l’expérience. Enseigner des connaissances objectives, transmettre des outils d’expression et de compréhension — à commencer par la langue —, cultiver des matières et des valeurs non périssables, c’est créer des personnalités pourvues de maîtrise et sûres de leur jugement propre. Le contraire exact de l’être interdépendant, balbutiant et immature que l’école moderne est fière de fabriquer. Si un tel projet est antimoderne, c’est que la « modernité » est devenue synonyme de régression et d’esclavage.</p><br />
<p><strong>Jean Romain a introduit dans le débat scolaire suisse des idées percutantes, fraîches, et des auteurs novateurs</strong>, tel qu’un Jean-Claude Michéa avec son <em>Enseignement de l’ignorance</em>. Dans ses chroniques, que j’ai eu l’honneur de publier sous le titre <em><a href="http://www.editions-xenia.com/livres/romain/">Pour qui sonne le même</a></em> (Xenia 2006), il montrait avec lucidité que la postmodernité ne construisait pas un nouveau monde mais se contentait de déconstruire l’ancien: « la fin du monde est derrière nous »! Ses références et ses lectures retracent un conservatisme de civilisation, chrétien mais non politique, ni de droite ni de gauche, qui tient en un seul parti pris: celui de la <em>loi naturelle</em>, partagée et non fabriquée, que l’Ingénierie scientiste des âmes s’ingénie à disséquer et à faire disparaître, pour la remplacer par des doctrines interchangeables entièrement dues à l’arbitraire des modes et des jeux de pouvoir. En un mot, pour reprendre la magnifique métaphore de C. S. Lewis, Jean Romain est un taoïste. Défenseur de cette « Voie » (Tao) que toutes les civilisations se sont toujours efforcées de suivre, sur laquelle elles ont toutes fondé leurs systèmes de valeurs, mais que personne encore n’a pu définir ou altérer. Toutes les traditions, toutes les sagesses en proviennent, ainsi que tous les codes fondamentaux de conduite. L’école était l’un des lieux de cette transmission tacite jusqu’à ce que des mages « scientifiques » viennent en redéfinir la mission comme les méthodes au gré de leurs expérimentations.</p><br />
<p>Politicien poli mais argumenté, membre d'un parti bourgeois peu enclin aux débats de fond, Jean Romain mène, à l'écart des chapelles, un combat plus important que les causes politiques. Il y va, au travers de ce que nous enseignons aux générations nouvelles, de la survie de l'individu civilisé ou de sa transformation en un troupeau docile encadré par une élite autoproclamée d'idéologues et de technocrates.</p><br />
<p><em>Le Nouvelliste</em>, 4 juin 2013.</p><br />
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<p>N. B. — Du fait d'un malentendu rédactionnel, le texte paru dans le "Nouvelliste" du jour était une ébauche et non la version définitive. Le présent texte fait foi.</p>
</blockquote>Slobodan Despothttp://www.blogger.com/profile/11548113849369169603noreply@blogger.com0